Rue principale

La fin des vacances approchait doucement et l'excitation globale générée par la rentrée redynamisait un peu les ruelles de Pré-au-Lard. James traversait l'axe principal du village, avec comme seul signe distinctif ses mains toujours gantées.

Ses pas l'auront mené au plus beau magasin de Wizardwear du village.

Dans la rue et à l'abris de l'attention de l'hurluberlu coiffé, Celonia se laissa aller mais, ce qui chez d'autres pourrait s'apparenter à un esclaffement gras et Ô combien indélicat, ne se déclina chez la petite Harpis qu'en un ricanement qui tenait plus du gazouillis que du sardonique.

- Le drôle de monsieur, là... Dit elle en adressant un regard à la boutique. Il doit racheter une baguette à son fils parce que ce dernier a confondu une baguette magique avec une baguette de pain, t'aurais du voir la tête de Steward !

L'accoutrement du bonhomme, son attitude grave et impliquée, de ceux forgeant le destin de demain, couplée à la mimique désabusée de Stewart avait suffi à créer un comique de situation qui, en plus d'avoir grandement amusée la jeune fille, lui permettra de vouer une pensée émue à cette boutique de baguettes.

Au moins était elle parvenu à alléger un peu l'ambiance, la jeune Harpis n'était pas niaise au point de ne pas comprendre que les questions de Jude n'avaient rien de conventionnel. Pourtant et, en dépit de tout, elle ne brûlait pas d'envie de le questionner car elle craignait que les réponses apportées n'alourdissent considérablement l'ambiance. Ainsi, elle se permit de rebondir sur la plaisanterie du jaune :

- Au moins celles là ne dysfonctionneront pas !

Les baguettes de Miam'gique avaient au moins le mérite de remplir leur fonction première, chose que ne faisaient pas nécessairement les baguettes du marchand de Pré-Au-Lard. Heureusement, trop focalisée sur ses autres soucis pour se focaliser sur ce seul point, elle avait pu occulter les aigreurs qu'elle vouait à l'égard de sa propre baguette.

- Oui, je l'ai vue dans la gazette ! Répondit elle en hochant rapidement la tête. C'est formidable, je trouve ! Bon je ne serai pas la première à la tester, mais si ça fonctionne comme ils en parlent dans la gazette, alors ça sera formidable ! Elle imaginait bien que la mise en place du réseau mettrait des années, voire des décennies pour être pleinement opérationnel, mais le simple fait de pouvoir assister aux prémices de la chose avait quelque chose de singulièrement exaltant. Peut être pourront ils se targuer d'avoir connu un avant et un après ?

Elle suivit naturellement Jude, elle devait se rendre là bas aussi.

Celonia hocha les épaules. Les boutiquiers ne lui avaient pas spécifiquement mauvaise impression, mais elle se doutait qu'il n'avait sans doute pas obtenu les réponses qu'il cherchait. Toujours est il, qu'à terme, elle espérait surtout pouvoir un jour obtenir l'une des baguettes d'Ollivander, elle aussi, mais c'était peut être le rêve pieux d'une jeune sorcière que tant d'autres avaient eu avant elle. Finalement, elle passa sur la remarque initiale de Jude, guère désireuse de lancer un débat.

- Je ne sais pas... En toute franchise, je ne connais pas grand chose à Pré-Au-Lard ! Et c'était vrai, Celonia ne résidait pas ici et n'avait traversé le village que quelques fois ; Pour faire des emplettes.

- Loin d'ici, pour me dépayser un peu ! Peut être dans des îles méconnues et tropicales ou dans des contrées enneigées ! Ou, peut être, tout simplement dans les grandes villes, Londres, Paris et les autres ! Elles doivent être extraordinaires à voir !

Les paroles de Celonia sur ses propres voyages imaginaires éveillèrent l'imagination de Jude. Il se perdit un instant dans ses pensées, visualisant les îles tropicales, les contrées enneigées et les grandes villes dont elle parlait. Il se demanda à quoi ressembleraient ces endroits, comment serait l'atmosphère, les paysages et les gens qui y vivent.

Auparavant, lorsque toute sa vie se limitait à son village et sa cabane avec Ariel, l'idée de voyager, de découvrir de nouveaux horizons et de s'émerveiller devant la diversité du monde l'avait toujours attiré. Mais pour l'instant, il se trouvait à Poudlard, en attendant la rentrée scolaire, sans trop savoir où sa propre aventure le mènerait. Tant qu'il n'en sait pas plus sur Ariel ni sur sa baguette il se voit mal battre la campagne pour s'amuser. Il aurait l'impression d'abandonner celle qui a toujours été là pour elle et le cadeau qu'elle lui avait offert et ça, c'était inconcevable.

- Il y a plein de boutiques à Pré-Au-Lard, c'est la partie la plus visible de la ville. Mais plus loin se trouve le quartier des réfugiés et ce n'est pas la partie la plus belle. Vu qu'on pourra venir ici le week-end, maintenant qu'on rentre en deuxième année, on pourra visiter la ville, si tu le souhaites.

En même temps, comment ça pourrait l'être avec des sorciers venus de tout horizon pour se réfugier ici en attendant que la tempête passe ?

- Je me demande si Abigail a eu le temps de visiter Paris mais concernant Londres, Eleanor vient de là-bas, peut-être qu'on pourrait aller avec elle et qu'elle nous fera visiter la ville. Et on pourra même aller voir Ollivander.

Qui doit sûrement en savoir plus sur les baguettes que les imposteurs de Pré-Au-Lard.

- Après notre passage à la boutique de vêtements on peut passer à Lo'Smith. Peut-être qu'il a de la poudre de cheminette et on pourrait se faire une idée du prix.

Jude était enthousiaste, c'était le moins qu'on puisse dire. Chacune de ses phrases était une proposition ou une projection et la jeune Harpis avait un peu de mal à savoir où donner de la tête. Toujours est il qu'il soulignait quelque chose d'intéressant : D'ici peu, les jeunes sorciers auront l'opportunité de se rendre à Pré-Au-Lard chaque weekend, ce qui pourrait représenter une série d'opportunités qui pourrait, potentiellement, être exploitées. Guère désireuse de faire des plans sur la comète pour autant, Celonia se souvenait que Poudlard exigeait beaucoup de travail et, au vu de son désir de se faire quelques sous chez Adadas, son temps disponible risquait d'être encore plus restreint que l'année précédente.

- C'est prévu ! Dit elle avec enthousiasme. Mais on a le temps pour ça ! J'espère juste qu'on fera des rencontres intéressantes ! Il doit y avoir de sacrés gens chez les réfugiés.

Finalement, le nom d'Eleanor fut évoqué. La jeune fille demeura interdite un instant. Occultant la proposition de Jude, elle souhaitait surtout savoir si son aînée s'était remise de l'agression qu'elle avait subi dans les couloirs.

- Tu parles d'Eleanor... Tu as pu la voir ? J'ai appris un peu tard qu'elle a été agressée dans les couloirs, mais je n'en sais pas plus...

Admit elle, un peu coupable de ne pas avoir désiré en savoir plus. De manière générale, Celonia n'était pas du genre à se mêler d'histoires qui ne la regardait pas directement.

-Lo Smith ? C'est une boutique de quoi ?

Celonia s'interrompit un instant. Effectivement, la remarque de Jude était on ne peut plus pertinente. Il fallait qu'elle apprenne à freiner ses enthousiasmes à l'avenir car, en l'état, cela pourrait effectivement vexer des gens qui n'auraient pas le coeur à ça.

- Tu as raison... Ils n'ont peut être pas envie d'être embêtés.

En dépit de tout, Celonia aimerait bien en observer certains. Pas spécifiquement interagir, juste étudier leurs moeurs, leurs mimiques et leurs état d'esprit, très certainement qu'il y aurait beaucoup de leçons à tirer de certains, mais la jeune Harpis était sans doute beaucoup plus candide que ne l'était Jude.

- Je n'ai appris son agression que tardivement ! Elle va bien ? Si elle a été à l'infirmerie ça devait être grave ! Moi je pensais qu'on l'avait juste un peu embêtée dans les couloirs !

Celonia, trop occupée par ses travaux et ses propres intrigues, avait lourdement sous estimé la violence de l'agression dont Eleanor avait été victime. Libre à Jude de lui en dire plus ou non.

- Oh ça doit être amusant à visiter ce genre d'endroits ! J'y passerai, pour sur !

Mais pour l'instant, il était important qu'elle se focalise sur Adadas, c'était sa petite mission du jour, après tout.

Aux yeux de Celonia, on faisait là une grande affaire de pas grand chose. Puisque personne ne l'avait informée de la violence de l'agression subie par Eleanor, elle s'en tiendra à ça pour l'instant. Toujours est il qu'elle constata que Jude semblait prendre cette affaire très à coeur mais, une fois encore, c'était tout son personnage que de s'émouvoir à l'excès de peu de choses, l'affaire "de la bourse" en avait été, à ses yeux, l'exemple parfait. Pour le reste, elle n'était pas au fait de l'agression subie par Johannes, mais aurait chaleureusement applaudi l'auteur d'un tel forfait.

- Elle en a peut être qu'elle ne connaît pas...

Maugréa-t-elle en hochant mollement les épaules. Les poufsouffles étant des êtres frustrés et jaloux, certains avaient peut être comploté contre elle sans jamais oser la confronter de face. Celonia devra d'ailleurs se méfier de ce genre d'agissements et rester sur ses gardes à partir de maintenant.

- Ce n'est pas comme si j'avais les moyens de me faire arnaquer de toute façon...

Ricana-t-elle avec amusement. Celonia n'ayant pas un sou en poche, se faire arnaquer était le dernier de ses soucis.

- Je vais entrer chez Adadas, on se rejoint quand j'ai fini ?

Jude attendait patiemment devant le magasin de bonbons, Honeyduke. Ill était curieux de savoir si Diego allait réussir à obtenir son fameux "cadeau". La simple idée de participer à cette petite aventure l'amusait, et il se demandait si Diego avait un plan astucieux en tête, après tout c'est un Serdaigle n'est-ce pas ? Cette maison est censée avoir plus d'un tour dans leur sac . Mais il était tout de même préoccupé par la perspective de se mettre dans une situation délicate, à la limite de la légalité. S'ils étaient attrapés allaient ils être bannis de tous les commerces de Pré-au-Lard ? Quel horreur ! Mais bon, après tout, lui ne commet pas l'acte il ne fera que parler au vendeur. Quel mal a-t-il de s'informer sur les dernières pâtisseries en vogue ?

Les minutes commençaient à défiler… Et pas le moindre signe de son complice.  Il avait annoncé dix minutes à Jude, l'heure était arrivée et pas le moindre signe à l'horizon.  Alors que le Poufsouffle s'apprêtait peut-être à partir, et oublier cette bien mauvaise idée, il vit une silhouette au loin. Casquette en laine trop grande, renfrognée par-dessus le museau ; on y distinguait à peine le bleu marin qui peignaient aussi bien la capuche que la boutonnière de sa robe. Il portait son cartable en bandoulière.
Diego arriva à hauteur de Jude, bien qu'il n'etait pas bien grand pour son âge il semblait dépasser le blondinet d'une tête ; peut-être que ce dernier souffrait d'une forme de nanisme.
Le visage du grenadien était grave, jamais Jude ne l'avait si sombre, bien que la nuit approchait.

- Jude. Si yamais on sé fait prendre, yé veux qué tou disses à Maria...

Il jetta un coup d'œil par dessus son épaule. Diego ne finira pas sa phrase, prenant appui sur ses talons, il se mis à trifouiller dans son cartable...

Jude était perdu dans ses pensées, observant les passants et les étals colorés de Pré-au-Lard. Alors qu'il attendait devant Honeyduke, il était absorbé par les odeurs sucrées qui émanaient de la boutique, laissant ses pensées divaguer.

Soudain, une voix le tira de sa rêverie, et il sursauta presque en se retournant pour faire face à Diego. L'accoutrement du Serdaigle était si différent de ce à quoi il s'attendait que le jeune Poufsouffle avait du mal à le reconnaître au premier abord. Le Serdaigle était méconnaissable, vêtu d'une manière qui tranchait radicalement avec l'apparence d'un étudiant de Poudlard. Son regard s'attarda sur les vêtements et l'accoutrement étonnant de son camarade. Il aurait pu jurer qu'il ne s'agissait pas de Diego s'il ne l'avait pas entendu lui parler.

Puis tout à coup il évoqua Maria. Une fille introvertie mais qui avait l'air plus que sympathique mais les deux camarades n'étaient pas si proche que ça, pour l'instant. Peut-être quelque chose à rectifier au cours de l'année qui va bientôt reprendre.

- Attends ? Quoi ?! Qu'est-ce que je dois dire à Maria ?

Puis regarda attentivement Diego en train de chercher quelque chose dans son cartable.

Du cartable fut extrait un quelque chose emballé dans du papier journal. Le Serdaigle déposa l'objet avec soin sur le sol.

- Tou dois loui dire Jude... Qué... Elle doit savoir...

Rien d'autre n'accompagna sur l'instant ces paroles, ni même d'autres objets. Jude, s'il avait l'œil, aura simplement remarqué qu'il y avait au moins trois livres dans le cartable. Le Serdaigle se releva, prenant possession de la boule de journal. Il glissa ensuite la bande en cuir de son sac par dessus son épaule, prenant soin de ne pas faire tomber son béret au passage.
Diego marqua une nouvelle pause, et soudain, ses deux prunelles d'ambre fixèrent son interlocuteur. Cela dura bien quelque secondes, au bout desquelles Diego semblait avoir obtenu ce qu'il voulait.
Il lui tendit finalement ce qu'il avait en main.

- Tiens. Prends ça. C'est oune bombabousse. Si yamais el patron sé rend compte dé quelqué chosse...
Et n'oublie pas dé dire à Maria... Diego prit une grande inspiration. Qué y'ai touyours sou, qué c'était... Mi Hermanita.

Son camarade Serdaigle semble lui faire étrangement confiance au sujet de cette Maria. Il n'a aucune idée de ce qu'il veut dire, ne parlant pas cette langue et ne connaissant que la langue britannique, mais son interlocuteur a l'air tellement intense qu'il ne peut que le prendre au sérieux. Alors qu'il se saisit de la "bombabousse", le jeune blaireau regarda droit dans les yeux de l'aigle.

- Je te le promets que, si ça tourne mal, je la mettrai au courant.

Pendant un instant, il se demande quelle étrange dynamique relationnel pouvait exister au sein de la maison des intellectuels. Mais, dans tous les cas, on doit respecter les souhaits de quelqu'un dont les derniers instants sont, potentiellement, proches.

- On y va ?

Dis-t-il en rentrant dans la magasin Honeyduke.

- Bien joué Diego ! Je dois juste faire une dernière chose. On se retrouve à la place des réfugiés.

Jude tente de repérer l'enfant avec sa mère et dés que c'est fait de courir vers l'enfant, lui donner le beignet pour ensuite courir le plus loin possible de la folle furieuse qu lui sert de mère.

Court sur pattes mais agile, Jude serpenta dans la foule jusqu’à donner le précieux beignet à l’enfant.

- Oooooh! fit-il, des étoiles dans les yeux.

Le gosse ébahi s’apprêtait à croquer dedans alors que sa mère pestait contre Jude qui s’enfuyait déjà ; elle attrapa alors le beignet des mains de son fils, le jetant par terre avant de l’écraser sous sa botte, nullifiant la bonne action de Jude…

Tandis qu'elle peste à son encontre. Le jeune garçon ne peut s'empêcher d'être triste pour son enfant. Il allait tenter de jouer la pitié, après s'être assuré que des passants et passantes étaient témoins de la scène
, il commence à ramasser les miettes du beignet et pour un peu rajouter du drame il dit assez fort.

- Pourquoi Madame ? Je l'avais acheté avec mes économies.

Voyant les passants comment à s’interroger devant la scène, des regards médusés devant l’enfant au bord des larmes, la mère se mit à hurler, tentant de chasser Jude avec de grands mouvements de bras.

- AU VOLEUR! CE PETIT VAURIEN A ESSAYÉ DE VOLER LE BEIGNET DE MON FILS!!!

Les passants visiblement ne savaient que penser de la situation, les prochaines actions de Jude seraient cruciales.

Jude reste la et tente d'appeler à la raison.

- Je l'ai acheté à Honeyduke. On peut aller tous ensemble au magasin demander si vous en avez acheter un.

Puis le jeune Poufsouffle chuchote au garçon pendant que sa mère est occupée à crier.

- Viens on va se réfugier au Honeyduke pour en acheter un autre.