Re: Un coin d'herbe

Voilà une accélération que n'aurait pas renié Henry Thenry à sa plus grande époque. Satisfaite d'avoir été aussi rapide, elle profita de son avance pour observer la position de la tête blonde qui se trouvait plus bas avec une idée en tête. Eleanor repartit de plus belle en fonçant jusqu'au zélandais afin de se caler juste derrière lui de façon à ce qu'il se trouve entre elle et ses assaillants, le but étant que Johannes se prenne ses propres oiseaux.

La manœuvre était un peu plus technique qu'une simple accélération. C'était pataud mais Ellie s'en sortit à peu près, parvenant à se glisser derrière Jo qui accourait. Les étourneaux aussi accouraient à toute allure, ailes repliées et becs en avant ils fondaient comme des rapaces. Parvenant presque à rattraper Ellie, ils virent cette dernière se dérober et Jo se dresser brusquement sur leur chemin.

Surpris, non par la manœuvre d'Ellie, mais plutôt par la vitesse supersonique des volatiles, Johannes tenta de rompre le charme en catastrophe.

Il n'y parvint pas totalement ; un étourneau disparut mais deux autres le frappèrent en pleine poitrine. Le dernier le frôla et termina sa course sur Ellie. Les volatiles se volatilisèrent à l'impact, n'y laissant que quelques plumes.

Eleanor était plus que fière de sa manœuvre qui avait vu Johannes se faire retourner son propre cadeau. Dans un ton plutôt aigüe, elle laissa échapper sa joie.

- Ouai ! Youhou ! Alors t'en dis quoi Jo' ?

la rousse se mit à rigoler alors qu'elle tournait en rond autour du Poufsouffle, toujours à ras du sol.

- Je suis sur que je suis plus agile et rapide que Maria encore !

Non, vraiment pas.

Il se massa le torse en grimaçant là où les oiseaux l'avaient frappé.

-Euh... Ben... Disons que avec de la ruse comme ça, oui tu peux l'avoir !

S'il y avait bien une chose qu'il avait appris en jouant, c'est que tous les moyens légaux étaient bons pour gagner.

Eleanor finit tout de même par atterrir à nouveau en tenant le balais dans sa main

- Malheureusement même avec toute la ruse du monde je pourrais rien faire contre elle ou contre toi.

Trêve de plaisanterie, la rousse ne pensait évidemment pas être capable de rivaliser avec qui que ce soit.

- En tout cas je sais pas d'où t'es venu cette idée d'envoyer des oiseaux mais ça peut faire un exercice pas mal pour s'améliorer dans les dribbles ! Vous le faites à l'entraînement ?

Cela faisait maintenant quelques semaines que l'opération des Lucioles était terminée et Eleanor essayait tant bien que mal de reprendre une vie d'élève en vacances tant bien que mal. Et pour ce faire la Poufsouffle s'était attelée à reprendre ses efforts afin de travailler sa magie "musicale" si encore elle en était pourvue, ce qui n'était pas sûr au vu du manque de résultat. Mais il fallait tout essayer avant de se résigner.

Comme la dernière fois elle avait laissé ses émotions du moment travailler une courte mélodie, des émotions qui étaient plutôt fortes au vu de ce qu'elle avait vécu comme première expérience avec le camp moldu. Cette fois elle avait créé sa mélodie avec en tête l'envie de faire brûler le bol qu'elle avait toujours mais cette fois sans eau dedans et qu'elle avait placé sur un rocher. Si ça marchait au moins ça pourrait la défouler un peu.

Rien ne se passe.

Eleanor aura recommencé quelques jours plus tard. Peut être que l'effet escompté était trop "puissant" encore ? La rousse aura refait une mélodie mais cette fois en tentant d'y insuffler de la joie en repensant à ses meilleurs souvenirs à Poudlard avec pour objectif de faire bouillir de l'eau. Elle était revenue au bol d'eau originel donc.

Rien ne se passe.

Eleanor tenta de jouer le Chant de l'Apaisement pour pouvoir comparer et voir ce qui n'allait pas dans ce qu’elle faisait. Quelles différences ressentait elle ?

La lyre dégagea de l'énergie magique habituelle lorsqu'elle joua le chant concerné, et n'en dégageait pas lorsqu'elle jouait sa propre composition.

Est-ce que ses connaissances en solfège lui apportait des informations ? Le Chant de l'Apaisement et la mélodie que lui avait faites joué Elisabeth avaient quelques choses de particulier dans leur partition ?

En dehors de la magie qui se dégageait du Chant de l'Apaisement, que ressentait elle ? Est-ce qu'il se passait quelque chose en elle ?

Non plus

Eleanor soupira avant de souffler du nez et de regarder sa lyre avec un léger sourire.

- J'ai rien de spécial hein ?

C'était semble t'il l'instrument qui faisait tout, toute la magie s'en émanée contrairement à elle qui ne produisait rien, Elisabeth s'était peut être enthousiasmée un peu trop vite à son sujet. C'était peut être vrai mais elle en doutait maintenant. Elle essayerait un jour si elle avait une idée à tenter. Pour le moment elle se contenta de jouer la longue musique qu'elle avait composé avant de rentrer au village.

Finalement Eleanor revint encore, les vacances lui permettaient d'avoir pas mal de temps libre à accorder à la musique. A force de cogiter elle ne pu s'empêcher d'avoir une nouvelle idée qu'elle s'était attelée à préparer. Plutôt que de composer à partir de zéro, elle avait décidé de le faire en poursuivant la mélodie que lui avait donné Elisabeth. Si de la magie se manifestait en la jouant alors peut être qu'en y apportant sa touche ça pourrait fonctionner. Ce n'était qu'une théorie mais ça ne coûtait rien d'essayer.

Pendant plusieurs jours la Poufsouffle avait ajouté une courte suite à la chanson pour y mettre sa patte et ses émotions, les émotions les plus négatives car c'était ce qu'il y avait de plus fort chez elle dans le contexte actuel. Avec toujours cette envie de faire bouillir l'eau de son bol qui était fidèlement là comme les autres fois.

Au loin, au fin fond de la clairière dans laquelle s'était installée Eleanor en cette fin de soirée, trônait une boule de chaleur clignotante et lumineuse, trahissant la présence d'un feu de camp alimenté par le jeune écossais. Il venait de s'installer après avoir réuni quelques rondins de bois tout fraichement cueillis dans la forêt avoisinante.

Ses gants retirés et précieusement déposés dans son sac plus loin, James vint lentement rapprocher sa dextre du brasier, ses yeux déjà plongés à l'intérieur, puis continua son geste jusqu'à ce que sa paume finisse par tremper dans ses flammes. Il fut un temps où l'Ashworth ne pouvait traverser le couloir aux torches de Poudlard, aujourd'hui, l'enfant des Highlands jouait de cette phobie qui avait participé à sa construction en tant qu'homme. Il ne craignait plus cet élément qui l'avait tant fait souffrir. Il le maitrisait et en avait fait son arme, son don. Un sacré comble lorsque l'on connaissait son histoire, son nom de famille, comme si le destin se jouait de lui et s'amusait à l'harceler de signes. Des signes qu'il interprétait désormais avec beaucoup de sérieux.

Les prunelles reflétant les étincelles, sa sénestre vint s'élever tandis qu'il s'écartait du foyer, puis sa dextre suivit et les flammes commencèrent à se mouvoir dans une danse maîtrisée. Il était capable de les faire tournoyer autour de lui, de les alimenter, les réduire, mais quels autres secrets sa progression et ses entraînements pouvaient-ils découvrir ? Ainsi, le jeune homme alla jusqu'aux limites aujourd'hui présentes et les repoussa encore. Plus loin, plus rapide, peut-être plus précis ? Il tenta alors de donner des formes à ses flammes, parfois celles d'une simple boule de feu semblable à un petit soleil, tantôt celles d'un aigle prêt à fondre dans l'espace. Cette tentative n'était pas seulement esthétique, elle lui permettait de tenter d'augmenter la densité de ses manipulations. Un flux plus important, plus condensé, capable de créer un véritable choc à l'impact, contrairement à un jet de flammes plus classique.

Rien ne se passa concernant Eleanor. Sa lyre tiqua cependant à la première note de sa première mélodie, comme si comme quelque chose se déclenchait mais restait à être approfondi, complété, validé, et que les mélodies qu'elle pensait avoir si facilement complété n'étaient qu'un mirage provoqué par sa propre vanité.

***

James parvint à faire tournoyer ses flammes comme il l'entendait. Parvenant simplement à en créer au départ, il était avec le temps parvenu à en créer un peu plus d'une part, mais également à les manipuler dans l'espace et dans leur forme, comme s'il avait un contrôle intrinsèque sur elles. Au demeurant, il peinait encore à faire de même sur le feu qu'il n'avait pas créé, comme s'il avait une affinité particulière avec ses flammes seulement, ce qui était peut être logique vu qu'elles émanaient de sa magie, c'étant sans doute l'une des raisons pour lesquelles son feu ne brulait plus sa peau.

James dirigeait donc sa capacité vers une manipulation à la précision accrue, parvenant à leur faire adopter des formes plus ou moins ressemblant à ce qu'il désirait. Il manquait cependant encore de controle sur son pouvoir pour parvenir à définir parfaitement les contours des formes qu'il imaginait.

Ce jour là, autour du feu, pour la première fois, James parvint à faire quelque chose qu'il ne comprit pas lui même au début: ses flammes semblaient rentrer dans elles mêmes, se contracter. La sphère de flammes qu'il avait tenté de réaliser s'était compressée sur elle même. Il le sentait: ce feu était plus chaud, plus concentré, et ferait autrement plus d'effet que les flammèches qu'il envoyait sur les torches pour les allumer...

Ses sourcils se froncèrent légèrement. De tout ce qu'il avait testé jusque-là, c'était bel et bien ce petit soleil qui l'avait captivé, puisque sans même faire exprès, l'écossais venait d'ouvrir une nouvelle porte du long couloir qu'était son don. En souhaitant rendre ses flammes plus "denses", James avait vraisemblablement réussi à découvrir une manière de les transformer en une arme plus dangereuse encore. Concentrant sa magie en un point fixe qui venait restreindre cet élément si sauvage qu'était le feu, ce dernier gagnait en animosité et la combustion de l'air s'intensifiait alors drastiquement, un phénomène qu'il mit quelques dizaines secondes à comprendre, mais qui lui donna l'irrésistible envie d'essayer.

Alors son emprise libéra la sphère embrasée, et l'envoya s'éclater contre un rocher pour en observer les effets. La densité avait rendu son feu certes plus chaud, mais ce dernier avait-il gagné en impact par la même occasion ?

James envoie sa boule de feu compressée vers un rocher mais rate quelque peu sa visée. La boule s'écrase à terre, un peu à côté du caillou visé. Elle éclata dans une grande gerbe de flammes à l'impact. Une légère trace à l'épicentre de l'explosion laissait à penser que oui, un impact était présent, mais que James devait mieux maîtriser ce pouvoir de compression des flammes nouvellement acquis. Il n'en restait pas moins que les brulures associées étaient plus intenses, de ce qu'il pouvait en voir sur l'herbe.

Son geste, peu maîtrisé, manqua sa cible et s'écrasa dans un éclat de flammes bien plus impressionnant que d'habitude. Curieux, l'écossais s'approcha de son méfait après avoir étouffé les quelques misérables départs d'incendies d'un geste de main. Son regard détailla l'herbe, ou plutôt la terre qui en restait, victime de l'impact que venait de causer sa toute nouvelle capacité. Satisfait, le jeune homme retourna auprès du feu de camp qu'il ralluma d'un claquement de doigts, avant de revêtir ses gants qui l'attendaient sagement depuis tout ce temps. Sa main plongea dans son sac, en sortit un parchemin, une plume et un encrier. Assis sur une buche retournée, le jeune homme se mit alors à écrire sans perdre de temps, traçant ce phénomène dont il commençait l'étude.

Eleanor comprenait qu'il fallait certainement qu'elle prenne le temps de mieux apprivoiser cette mélodie et celles qu'elle pouvait créer. Avait elle sous-estimé le travail à accomplir au vu de maîtriser pleinement ces partitions et ce qu'elles évoquaient ? La Luciole décida de se focaliser sur cette mélodie que lui avait confié Elisabeth quelques mois plus tôt et qu'elle n'avait jamais vraiment prise la peine d'explorer. Alors la musicienne prit le temps de jouer encore et encore ce court morceau pour se l'accaparer et surtout le comprendre. Ce que ça pouvait lui faire ressentir et lui évoquer sans spécialement attendre autre chose pour l'instant. Dans ses essais elle s'était sûrement que trop peu focaliser sur le coeur : la musique.

Elle fait donc.

Durant le temps que la rousse passa à jouer, elle vit évidemment le feu au loin, aidée par l'obscurité tombante, qui était très certainement un feu de camps et sa curiosité fini par devenir plus forte que son envie de s'exercer, d'autant plus que la nuit commençait que ça allait donc être compliqué de poursuivre. Eleanor se demandait qui pouvait bien se trouver là-bas. Une personne ? Un groupe ? Des adultes ? Des élèves ? Le plus efficace pour le savoir était encore d'aller voir par elle-même.

Ainsi la jeune femme incanta un Lumos pour se rendre jusqu'à l'autre bout de la clairière. James pourrait donc voir un petit lumière blanche s'approcher petit à petit jusqu'à ce que les flammes de son campement révèle un visage qu'il connaissait. C'était un léger sourire qui apparu sur le visage de la Poufsouffle alors qu'elle reconnue également l'écossais et c'est avec un brin de légèreté que la préfète entama la discussion.

- Attention au couvre-feu Ashworth ou je devrai sévir.