Re: Le Bal de Noël 1651

Sous le couvert tamisé d'un lustre gargantuesque, les lueurs de cristaux blancs brillaient de mille feux pour répandre une multitude d'éclats chatoyants sur les visages bénins. Les promesses mirifiques étaient susurrées à l'abri des regards, le battement des cœurs allait de concert avec les confessions ; en somme, l'émergence d'une nouvelle année planait au-dessus des têtes tandis que la liesse collective semblait s'être perdue dans l'effervescence générale.

Dans un concours de circonstances, les accords et rythmes travaillés de Dante lors de cycles tardifs rendaient hommage à cette nuit de festivité, portant finalement leurs fruits dont seul Nymeria aura pu en récolter l'ambroisie. Yeux ancrés dans ses agates, le Rouge se perdit dans la contemplation du moment. Il en aura par ailleurs englobé l'entièreté, marquant d'un grand coup de pinceau à la peinture inaltérable les pourtours de son tableau. Ses gestes dansants étaient calés sur les siens - mains liées - tout comme ceux de la lioncelle l'étaient sur ses mouvements et ses pas. Loin d'être des danseurs hors-pairs, leurs étourderies arracheront chez eux quelques accrochages de pieds et de rires cristallins s'évanouissant sur le fond de musique.

Tantôt à l'allure de gandin, tantôt éphèbe dans ses manières assumées, le Griffon se jouait des convenances sociales. À l'image des damerets aux visages androgynes, il imitait parfois avec bêtise enfantine leurs mimiques décousues avant de reprendre sans prétention son style plus adapté. Les notes de musique étaient parsemées de ses ricanements et ses yeux ardents d'aventures étaient pâmés sur une mer tempétueuse au soleil radiant.

Ce ne fût qu'à la dernière octave mélodieuse qui signait aussi la fin de leur danse que le Gryffondor sortit de la piste, s'accompagnant de sa partenaire qu'il aura libéré de son étreinte. Après un effort aussi déroutant, il n'y avait qu'une seule destination possible pour eux. C'est donc face à un buffet coloré et garni qu'ils jetèrent leurs dévolus sur les mets qui passaient sous leurs regards, partageant boissons et victuailles afin de se requinquer et considérer les remous de vagues restants sur la piste de danse, devenue mer bonace.

Lorsque Celonia tendit doucement sa main vers lui, Jude se sentit un peu nerveux, mais il ne put s'empêcher de sourire suite à la révérence un petit peu maladroite de son amie Serdaigle. Il serra doucement sa main dans la sienne et suivit son amie sur la piste de danse. Il fut étonné de ne pas voir Eleanor avec Johannes sur la piste de danse, peut-être la verra-t-il plus tard ? Son regard se porta également autour d'eux. Pas de Bryce et ses compagnons en vue mais, également, pas de Maria. Il espère que l'absence de ces deux groupes ne témoigne pas d'un mauvais présage.

Mais le plan du jeune Poufsouffle ne s'arrêtait pas uniquement à l'invitation de Celonia lors du bal : le but était de lui en mettre plein la vue.

En effet, après son entrainement avec Eleanor, Jude était plus confiant et sûr de lui sur la piste de danse. Il avait appris à coordonner ses mouvements avec ceux de sa partenaire et à suivre le rythme de la musique avec plus de précision. Sa posture était également plus élégante, moins saccadé ou désordonné, et il avait gagné en fluidité dans ses déplacements.

Il fait particulièrement attention à ne pas marcher sur les pieds de Celiona, mais il ne pouvait s'empêcher de sourire en réalisant à quel point il avait progressé depuis ses premiers pas maladroits qui avaient la fâcheuse tendance à toujours écraser les pieds d'Eleanor. Il se sentait heureux, et surtout fier, de pouvoir profiter pleinement de ce moment avec son amie, se sentant, pour une fois, son égale.

Lewis était entré seul dans la Grande Salle, ce qui ne l'avait pas empêché de le faire fièrement ! Le petit poufsouffle bombait le torse et levait le menton pour dévoiler à la vue de tous le très beau papillon noué à son cou. Crâneur, il allait voir les différents couples qui dansaient, soit ses propres camarades, soit des ainé(e)s poufsouffle qu'il appréciait pour leur demander s'ils avaient vu son joli noeud papillon que Peter Riverside l'avait aidé à faire. Le chad de poufsouffle n'avait semble il pas fait qu'arranger le nœud de Lewis, car le reste de sa tenue ne manquait pas d'élégance. Ne lui manquait plus qu'une cavalière, on pouvait deviner aisément qu'il avait oublié ce détail et qu'il préférait le buffet, néanmoins, Meghan Ratpiknot, une poufsouffle de troisième année et membre du groupe de Lewis ne lâchait pas ce dernier d'une semelle depuis qu'il était entré. Néanmoins, il alla voir Johannes et Eleanor, torse bombé, menton relevé.

— Eh les copains, vous avez vu mon joli nœud ? Il est beau hein ? C'est Peter qui me l'a fait.

S'ils étaient occupés à danser, Lewis irait rapidement crâner auprès de quelqu'un d'autre, toujours suivi par la malheureuse Meghan qui semblait furibonde envers Lewis l'aveugle...

Carlos débarqua en grandes pompes. Menton haut, torse gonflé, à son bras : une Serdaigle qui lui rappelait physiquement Oliver.

Voir Lewis fanfaronner avec sa tenue l'amusa beaucoup et bien évidemment elle répondit positivement à ses questions.

- Il est très beau ton nœud et il te va très bien ! Maintenant il faut trouver une fille avec qui danser pour le mettre en valeur !

La pauvre Meghan n'attendait que ça, c'était évident. Son regard se porta sur leur camarade jaune, espérant que Lewis finisse par la voir et l'invite sur la piste de danse.

L'oisillonne commença donc à danser en compagnie de Jude et celui-ci montra très vite qu'il s'était drôlement bien préparé ! Beaucoup plus que Celonia qui se laissait emporter par les pas de son camarade, ravie de voir que, si Jude n'avait pas travaillé ses révérences, il avait au moins eu le mérite de parfaire l'essentiel ! Pour sa part, elle ne prêtait pas la moindre attention aux autres. Sans doute était elle moins soucieuse que Jude ou, alors, seulement plus concentrée que son camarade qui semblait plus habitué qu'elle à ce genre d'exercices. Pour le reste, elle se contentait de sourire, simplement heureuse d'avoir eu l'opportunité de profiter de son premier bal à Poudlard ! Sa robe, conçue pour l'évènement, ne la gênait guère dans ses déplacements et elle se laissa guider par son cavalier, suivant sans rougir ses directives.

Elle se demandait si les connaissances qu'elle s'était déjà faites seraient là ce soir. Il lui semblait avoir aperçu James aborder une jolie fille à la chevelure blafarde et aussi Dante qui dansait avec Nymeria ! Elle était heureuse de voir des visages familiers s'engaillardir, quoiqu'elle regretta ne pas trouver dans cette foule effervescente les minois d'Abigail ou d'Ana. Après un nouveau pas, son regard tomba hasardeusement sur Eleanor, la gentille poufsouffle qui l'avait aidée à porter ses livres... Elle semblait discuter avec... ? Le fou furieux du couloir aux armures ? Celui qui l'avait traitée de sang-de-bourbe ? Cela ne lui plaisait pas vraiment, mais elle ne laissera pas à ce malotru l'opportunité de gâcher sa soirée.

Enorgueilli par le compliment d'Eleanor, Lewis hocha plusieurs fois la tête en tentant sans succès de réprimer un sourire.

— Oui merci ! Une cavalière ? Euuh... Ah salut Meghan t'es là ? Tu veux danser ? Attends je reviens juste 10 secondes !

La jeune fille hocha vigoureusement la tête à la demande de Lewis, et offrit un regard reconnaissant à Eleanor. Le trublion quant à lui alla voir deux ainées poufsouffle qui discutaient non loin de là pour... leur demander ce qu'elles pensaient de son nœud, roulant des épaules sur le chemin. Il se fit de nouveau complimenter sur sa tenue, et l'une d'elle lui replaça son col qu'il avait défait en gesticulant dans tous les sens, avant de le renvoyer à sa cavalière en lui disant gentiment d'arrêter de s'agiter.

— Merci ! Resalut Meghan, on va danser ? T'as vu mon beau noeud que Peter il m'a fait ? Et pis mon col il est joli aussi non ? Aurore elle me l'a remis !

Les deux partirent danser - autant de temps que pouvait tenir Lewis avant d'aller faire sa fête au buffet - laissant Johannes et Eleanor tranquilles.

L'Infante était descendue de la tour Serdaigle dans une nouvelle toilette qu'un hibou de Sophie lui avait apporté il y a quelques jours. Celle-ci bien plus simple à enfiler n'avait nullement nécessité l'aide d'une de ses camarades ... aussi l'absence de visage à mettre sur le cavalier secret qu'elle avait, la lettre reçue faisant acte de bonne foi, nécessitait ce choix là. Elle était anxieuse, ses expressions visibles sur son visage démontrait qu'elle le cachait difficilement, et quand elle arriva dans le grand hall elle ne vit personne qui ... serait son potentiel cavalier. Une boule dans la gorge alors que de sombres pensées lui vint se forma, peu importe pensait-elle, peut-être celui-ci l'attendait dans la salle, non pas comme la coutume l'exigeait. Aussi, la voilà qu'elle s'avançait, seule, heureusement bien l'abri de la lumière. L'on avait tendance à ne pas trop poser le regard sur María-Esperanza, c'était une chance, alors elle ferait tapisserie jusqu'à trouver ce qu'elle cherchait.

Les deux amis se déplaçaient gracieusement sur la piste de danse, suivant les instructions des musiciens de l'orchestre. Jude aimait particulièrement la façon dont les mouvements de danse semblaient se synchroniser avec la musique, créant ainsi un moment inoubliable. Comme si tout avait été prévu pour que tout soit parfait.
Ce moment était une vraie magie, il oubliait tous les soucis qui le préoccupaient et se laissait emporter par la beauté de la danse. Il était heureux de partager ce moment avec Celonia qui semblait profiter tout autant que lui de cette soirée magique.

Finalement, son attention se tourna également vers l'extérieur se demandant qui sera présent. Il distingua Eleanor, venue avec Johannes comme prévu, Lewis répandant la bonne humeur dans la grande salle, comme il avait l'habitude de le faire dans la salle commune Poufsouffle. Distinguant également Nymera, la fille qui l'a aidé au cours de potion, semble trouver chaussure à son pied et commencent à danser avec son cavalier Dante.

Il vit même Carlos venir avec une Serdaigle dont le nom ne lui revient plus mais qui était en cours de leur promotion. Il fut étonné, en effet, dans ses souvenirs il ne lui semble pas les avoir jamais vu parler ensemble, peut-être cela a été fait à la dernière minute ?

Même l'odieux James, représentant tout ce qu'il déteste, ne pouvait briser cet instant magique. Toute la haine qu'il a un jour ressenti envers l'odieux Serpentard est réduite à néant et ne représente plus aucune importance. D'ailleurs, ce dernier est avec une fille qu'il n'a jamais vu à la crinière blanche. Était-ce la sœur de Sun ? Il devrait aller lui demander. D'ailleurs, en parlant de lui, il ne le voit pas dans la salle. Son ainé semblait si confiant pour le bal, pourquoi n'est-il pas la ?

Maria fut arriva finalement dans la grande salle, ce qui soulagea le jeune Poufsouffle, elle n'avait pas été victime d'harcélement cependant elle est seule. Son cavalier a du retard ?

Pendant un bref un moment où la musique se stoppe, avant de s'enchainer sur une autre, Jude ne put s'empêcher d'adresser un sourire aussi sincère que ses paroles à Celonia.

- Merci.

La cage dorée semble avoir fait effet, du moins temporairement, et tous les soucis du jeune Jude semblent s'être envolés pour ne plus que pleinement profiter de cet événement.

María s’avança donc, discrète comme une ombre, au milieu de la foule dansante et riante, croisant des gens qu’elle reconnaissait. Son regard aurait bien du mal à voir la salle dans son entièreté, sa stature n’aidant pas, et, alors qu’elle manquait de se faire bousculer, elle parvint à un coin tranquille où elle pouvait observer les lieux d’une meilleure façon. Certains garçons étaient seuls, et l’un d’entre eux attira son attention: Sean McGregor, un camarade de promotion et de maison. Il était au buffet. Mais, bien vite, il alla rejoindre une gryffondore de troisième année. Non, ce n’était pas lui… Qui alors? Personne n’était venu lui parler encore, mais peut-être n’avait-elle aussi pas été remarquée?

Loin des danses et des rires, Run passa devant l'entrée de la Grande Salle sans y mettre un pied. L'air renfrogné et les mains dans les poches. Il était vêtu simplement, sans classe particulière. En fait, il n'était pas habillé pour le bal, car il s'était fait rejeter.

Alors il observait les autres s'amuser de loin, comme animé d'une curiosité malsaine, pour nourrir en lui une déception qui lui dévorait l'estomac. Le Grand Hall semblait bien sombre à côté des lueurs du Bal, mais ca lui allait bien, à lui qui était seul.

Elle devait le remarquer si elle se fiait à ce qui lui avait écrit son ... cavalier secret. "Au bal je t’attends, tu me reconnaîtras à la lueur dans mon regard" selon l'un des derniers vers du poème qu'elle avait trouvé joliment écrit, aussi elle observa les autres garçons semblant seuls à cet instant. Il y en avait forcément un parmi cela l'attendait, il DEVAIT forcément y en avoir un...

María vit Arthur Vilnieux au buffet, se délectant des divers plats. Elle vit quelques autres garçons qu’elle connaissait de vue, sans plus. Aucun ne semblait avoir de lueur particulière dans leur regard. Elle ne remarqua pas Run.

Tel un fantôme elle déambula à travers la salle, faisant attention à ne déranger personne, le long des murs, observant les rares garçons encore solitaires tandis que la majorité des élèves occupaient le centre de la grande salle dansant. Où diable pouvait donc être son mystérieux correspondant ... toujours convaincue, et cela était peut-être son drame, qu'on ne pourrait lui jouer un aussi vilain tour.

La plupart des garçons étaient soit accompagnés de filles, soit discutaient entre eux au niveau du buffet après avoir partagé une danse avec leurs cavalières respectives. Et si certains la remarquaient, ils l’ignoraient. Décidément, elle était comme seule au milieu de tous ces gens, et pas un regard ne semblait brûler pour elle.

Celonia n'avait pas remarqué l'arrivée de l'infante, et pour cause, elle n'avait pas la moindre idée de qui elle était. La solennité que Jude ressentait semblait le ravir et cela suffisait à la jeune fille qui, très éloignée des problématiques de son cavalier, ne semblait pas prêter tant de solennité que ça à l'instant présent. Pour elle, il ne s'agissait que d'un bal, le premier de sa vie, certes, mais elle en connaitra sans doute beaucoup d'autres, elle en était convaincue ! Après tout, quand l'oisillonne aura réussi à déployer ses ailes, elle se délectera de participer à tous les bals qui siéront. Son attention se reporta un instant sur la décoration des lieux. Le baroud d'honneur hivernal d'une année superbement remplie ! Sous les flocons qui s'effilochaient, elle s'amusait à observer certains garçons empêtraient dans leur margouillis, des mirliflores aux uniformes verts et argents essayer d'emberlificoter la cavalière de leurs rêves, des goinfres de la maison jaune s'esclaffer la bouche pleine devant le banquet, mais aussi les mines déconfites de quelques bachelettes dont l'homme DU soir tardait à arriver. Elle qui avait vu ce bal comme un jeu songea un instant à toutes les répercussions et enjeux que d'autres pouvaient en tirer.

L'espace d'un instant, elle parvint à oublier son insouciance et sa quiétude habituelles et ses yeux jadéites revinrent vers Jude. Il s'était préparé à l'avance et il semblait s'en être voulu de n'avoir pu dégoter meilleur costume. Pour lui, c'était bien plus qu'un jeu, il n'était pas du même monde que l'Harpis dont il s'était accroché aux serres. Que voulait il prouver ? Alors que l'orchestre offrait une seconde de répit aux deux enfants, elle se remémora leur discussion devant la bibliothèque. Jude semblait désirer faire ses preuves plus que tout, mais à quelle fin ? Cette question trotta dans l'esprit de la jeune fille qui, amortie tant par l'habileté de son cavalier que par le rythme des notes, sembla presque surprise lorsque le jaune reprit la parole.

- Merci ? Répéta-t-elle en souriant. C'est moi qui te remercie, j'aurais pas réussi à danser aussi bien si t'avais pas été là !

Gloussa-t-elle avec amusement.

Toujours personne, sa taille sans doute faisait que personne ne posait le regard sur elle, elle continua de marcher jetant des coups d'oeil aux solitaires quand même. Elle le trouver elle en était persuadée !

Elle ne vit personne captant l’attention, si ce n’est Run, dans le grand hall, l’air patibulaire.

A mesure qu'elle marchait, l'Infante comprenait cette terrible réalité: il n'y avait personne l'attendant. Personne ne voulait danser avec elle au bal ... Et la boule qui s'était formée dans sa gorge refaisait des siennes. Alors, la mort dans l'âme elle quitta la pièce aussi discrètement qu'elle était entrée avec ce constat derrière: personne ne s'était aperçu de son arrivée, personne ne remarquerait son départ, triste et amère.

Run était toujours dehors, maugréant parfois tout seul. Il leva la tête en voyant une élève sortir, et avait suffisamment d'intelligence sociale pour comprendre qu'elle était dans le même état que lui.

— Toi aussi tu t'es faite planter ?

L'amertume était palpable.

Il fallut énormément de ressources à l'Infante pour s'arrêter, se retourner et fixer la personne l'ayant interpellé en gardant un minimum sa dignité. Tout ce dont elle avait envie actuellement était de partir, loin, très loin d'ici et surtout d'être seule. Mais, elle ne bougea pas d'un poil.

-"J'imagine oui ..."

En réalité et son esprit naïf jusqu'alors commençait à y penser. María-Esperanza avait sans doute était victime d'une mauvaise plaisanterie, cette maudite lettre n'était qu'un .. canular pour se gausser d'elle, qui avait pleinement réussi.

-"Nous ne devons pas être les seuls je pense mais ... ce n'est pas agréable."

Jude ne sait pas vraiment prendre un compliment de par son inexpérience social. En effet, de son éloignement social, il n'a jamais eu l'occasion de sympathiser avec des enfants de son âge. Cela pouvait se ressentir comme par exemple ici où il détourna la tête gêné de la remarque de sa cavalière. Une gêne passagère cependant agréable. Le gloussement de la jeune Serdaigle est communicatif et il ne peut s'empêcher, à son tour, de rire légèrement.

- C'est plutôt la musique qu'il faut remercier. Si elle était mauvaise mes jambes auraient été incapables de bouger.

C'est bien sûr un mensonge : la plupart de ses entrainements avec Eleanor se pratiquait sans musique, au début du moins.
Une pointe d'inquiétude sert son cœur : Maria bouge trop et n'arrive pas à suivre du regard où elle va. Peut-être a-t-elle trouvé son cavalier dans la foule ? Il espère, en tout cas, la recroiser dans la grande salle.

- As-tu déjà été à un bal ? En tout cas, tu as l'air comme un poisson dans l'eau.

Run serra la mâchoire.

— Moi aussi... Enfin je me suis fait jeter comme une vieille chaussette plutôt.

Il baissa la tête un instant, se tenant silencieux, réfléchissant en réalité, avant de relever la tête, et de tendre la main vers Maria Esperanza.

— Qu'à cela ne tienne. Tu n'as pas mis cette robe pour rien, si ? On va pas les laisser se gausser de nous. Viens, je t'invite, enfin si tu veux bien, et si tu me pardonnes la tenue, les cheveux et la tête de déterré...

Le gryffondor au grand cœur (un peu cassé certes) avait repris le dessus, et ne comptait pas laisser ainsi une demoiselle en détresse. Il ne se rendit compte qu'après avoir formulé cette invitation peu orthodoxe qu'il risquait de se faire rejeter une deuxième fois et qu'il mettrait cette fois du temps à s'en remettre. Son apparence était convenable même s'il n'était pas préparé pour le bal, il n'avait sans doute pas eu l'intention d'y aller en premier lieu.

Malgré la tempête de danseurs qui recouvrait la lointaine côte, le navire parvint à accoster les terres à bon port. La déferlante n’avait force de freiner l’intrépide capitaine. Elle se présenta tel un vaisseau victorieux dont rien ne pouvait dissiper la gloire.

- Salut je vais bien et toi ?

Les apparences disaient le contraire, elle ne semblait visiblement pas dans son assiette. Elle baissa sa tête timidement et le remercia d’une voix presque imperceptible. La musique de l’orchestre étouffait toutes conversations pour n’en faire qu’un seul chahut. Elle l’invita à s’isoler dans un coin de la salle où les discussions étaient un peu mieux audibles.

- Je tenais à m’excuser pour mon retard. Je me suis endormie avant de venir… mais ce n’était pas intentionnel ! Je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit et mon corps a décidé que c’était le bon moment pour rattraper mon sommeil…

Navis semblait honteuse, elle fuyait le regard de James, et regardait où bon lui semblait si ce n’est en direction de son cavalier.

Ainsi donc María-Esperanza trouva son chevalier servant en la faveur du plus digne représentant de la maison des braves depuis le départ de Luçao. Celui-ci craignait un rejet de sa part mais il n'en fût rien: l'Infante aimait trop danser pour se priver de la présence d'un cavalier pour le bal, même si celui-ci n'était nullement en tenu. Aussi elle lui tendit son bras, chassant les larmes lui étant montées à la tête et prête à profiter de sa soirée gâchée.

-"Avec plaisir !"

Et d'un commun accord avec elle même, l'Infante jura de ne pas évoquer le cas de leurs partenaires d'origines pour ne plus se remémorer ce moment.