Le Bal de Noël 1651

James avait troqué le vert et l’argent pour le noir et blanc. Habillé d’un sobre costume sorcier d’époque, l’écossais ne dénotait pas des autres par ses habits, plus que classiques. Cependant, l’Ashworth se différenciait par des apparats qui marquaient son identité au quotidien : une immanquable paire de gants dissimulait en effet ses mains fragiles. Le regard toujours animé d’une vive étincelle, il attendait sa cavalière aux portes de la Grande Salle, impatient de la retrouver pour cette soirée si particulière qu’était le bal de fin d’année. Pour l’occasion, l’enfant des Highlands avait même fait l’effort de se coiffer, domptant ses féroces épis qui lui menaient la vie dur au quotidien.

Nul lézard volant accompagne l'entrée du Schtauffen qui arrive dans une tenue similaire à celle de l'année dernière. Son habit cérémoniel trop grand lors du premier bal sera donc devenu un peu plus convenable pour celui-ci. Son usuel ensemble noir est composé d'une veste en lin noire redressé par des épaulettes rembourrées, d'une ample chemise de la même matière qui descend jusqu'en bas de sa ceinture en cuir de cheval, d'un large pantalon et d'une paire de souliers cirés. Pour l'occasion, ses cheveux qui habituellement sont en bataille seront peignés en arrière, une petite mèche tombant sur le front pour accompagner son sourire tapageur.

Après avoir salué quelques camarades qui squattaient l'entrée de la Grande Salle, le jeune sorcier fera quelques pas à l'intérieur, cherchant du regard la tête blonde qu'il avait invité pour le bal. Une fois son regard croisant le sien, il ira prestement à sa rencontre d'un pas agile, cheveux voletant durant sa petite course jusqu'à ce qu'il s'arrime devant elle, léger sourire aux lèvres.

- J'ai garé le lézard dehors, il pouvait pas rentrer à l'intérieur.

Celonia n'avait pas eu à attendre longtemps pour voir arriver Jude. Son camarade de maison fut accueilli par un sourire sincère tandis que l'aiglionne se tournait vers lui, un chignon serré qu'elle s'était acharnée à dompter au dessus de la tête. De par la profession de sa famille, Celonia était l'une des rares élève de Poudlard qui pouvait se permettre le luxe de porter du sur-mesure et elle repéra bien vite que Jude portait un uniforme prêté, comme tant d'autres élèves qui ne pouvaient porter mieux. Elle ne sembla pas vraiment s'en émouvoir, consciente que tout le monde faisait comme il le pouvait en ces temps difficiles et, au contraire, apprécia les efforts effectués par son cavalier.

- Merci !

Dit elle sur un ton jovial et amène.

- C'est mon papa qui l'a faite ! On m'a dit qu'il s'y était mis à l'instant même où il a appris dans quelle maison j'étais répartie ! Dit elle avec une certaine fierté. Elle avait regretté que son père renonce à ses ambitions de grandeur après tous les récents évènements, mais elle l'estimait toujours beaucoup, lui et son travail.

- Pas trop le traque ?

Demanda-t-elle d'une voix espiègle. Il était rare de voir Celonia anxieuse pour grand chose et cette soirée ne faisait pas exception, mais Jude semblait un peu plus nerveux qu'elle.

Les minutes qui précèdent l'arrivée du preux Gryffondor sont passée dans la contemplation des duos de première année, amusant dans leurs malaises et tenues parfois particulièrement travaillées, ainsi que la vision d'une Sandra en forme à sa propre manière. Dante ignore qu'il est vu et détaillé dès son entrée par le regard dépourvu de gêne de la fille en rouge qui remarque au premier coup d'œil comme l'ensemble du garçon lui sied mieux à présent que la croissance fait son œuvre, quoique manquant toujours d'une rapière et d'un chapeau à plumes pour compléter le tableau, tandis que l'éventuelle princesse l'accueil avec un sourire qui ne laisse aucun doute sur le sentiment qu'elle éprouve.

-Ce ne sont pas des façons de parler d'Augustus.

Ricanant discrètement à sa propre blague elle reprend vite:

-Ta tenue te vas mieux de bal en bal, plus que deux ou trois ans et ce sera parfait.

Taquineries bon enfant pour débuter la soirée de façon légère, désacraliser le coté assez formel d'un tel événement.

Les boutiques de tailleurs n'étaient pas si rares chez les sorciers et Celonia se remémorait souvent, avec une pointe d'amusement, sa visite de la boutique Adadas avec le fameux Lewis. Toutefois, la question de Jude sembla l'étonner un peu. Evidemment que les tailleurs enchantaient certains de leurs oeuvres, la question était aussi pertinente que de demander à un alchimiste s'il utilisait des chaudrons !

- Oui, évidemment ! Dit elle avec un certain amusement, comme si elle avait considéré la question comme étant rhétorique. Mais le genre d'enchantements dont tu parles est très coûteux et assez peu demandé... Après tout, qui voudrait que le monde entier sache constamment à quoi il pense ? Moi ça me plairait pas en tout cas !

L'idée de paraître comme un livre ouvert ne semblait pas l'enchanter pour un sou. Toutefois, elle savait que certains sorciers étaient assez excentriques pour raffoler de ce genre de choses, mais même la curiosité de la jeune Harpis ne parvenait pas à se dévouer à tous les originaux de ce monde.

- Je ne sais pas ! On est supposé danser déjà ? Elle jeta un oeil aux alentours pour voir un peu ce que les autres faisaient. Peut être fallait il attendre une sorte de discours ou quelque chose comme ça ? Que faisaient les ainés ?

- Il a évolué de poulette à lézard entre temps ? Sacré évolution.

Il prendra le temps de sonder la tenue de sa partenaire à la toison d'or avant d'acquiescer pour lui-même. Si son costume lui allait mieux, les cheveux longs de la lioncelle eux étaient plus que bien porté. Rapportant directement ce que ses pensées lui dictent, il n'hésitera pas à dire le fond de sa pensée à Nym, un fin sourire aux lèvres.

- La tienne aussi, tout comme tes cheveux longs.

Après un bref regard auprès de l'assemblée du bal, le Rouge viendra lui tendre une main. Sans trop tergiverser, si celle-ci accepte, il l'amènera jusqu'à la piste de danse pour inaugurer leur rencontre d'une première danse.

Celonia secoua la tête, elle ne pensait vraiment pas que son père lui ferait ce genre de "blagues". C'était un homme aimant mais, surtout, assez taiseux et discret, ce genre d'opérations ne lui ressemblerait pas, quoique ce pusse être une belle surprise !

- Je ne pense pas qu'il ferait ça. Continua-t-elle avec amusement tandis qu'elle ne pouvait qu'opiner à la remarque suivante. Il y avait de tout dans le monde des sorciers et les excentriques un peu fous ne manquaient pas. Heureusement la plupart d'entre eux évitaient la boutique des Harpis, souvent hors des moyens des marginaux.

Finalement, Celonia observa Jude lui "tendre la main" et le regarda avec étonnement, se demandant ce qu'il voulait. Finalement, après une petite seconde de réflexion, elle comprit où il voulait en venir et ne put s'empêcher de glousser.

- Pas comme ça ! Souffla-t-elle d'une voix espiègle. Le garçon s'incline, demande à danser, puis la fille s'incline aussi et dit oui ! C'est comme ça qu'on fait !

Dit elle, plus amusée qu'autre chose car, en réalité, elle n'était pas spécifiquement protocolaire, mais avait envie de l'être pour l'occasion.

Eleanor arriva peu de temps après avec toujours ce léger retard sur Johannes, comme si c'était savamment calculé. La londonienne apparue donc avec une robe, à l'anglaise, en soie avec différents dégradés de bleu, en partant du blanc, qui devenaient plus foncés jusqu'en bas de sa jupe, des manches évasées blanches rejoignait le haut de la robe du même ton. La même qu'elle portait les autres années mais qui avait été rallongé en compagnie de sa mère. Ses cheveux, d'ordinaire détachés; étaient rassemblés en un chignon élaboré par le biais de piques à cheveux chinois. Une fine couche de font de teint vint blanchir sa peau déjà très claire.

- Jooo' !

En repérant le blond la jaune se hâta de le rejoindre avec un grand sourire aux lèvres. Qu'elle aimait cette soirée. Du regard elle chercha également Jude pour le surveiller du coin de l'oeil.

Il mima une révérence ridicule, une de celles qu'on voyait les sang-pur de serpentard réaliser devant des cavalières dont le visage chevalin indiquait la consanguinité de l'ascendance.

-Ellie. Belle robe. J'aime beaucoup le bleu, et ça te va très bien.

Combien de baux bals encore avant qu'un autre ne le remplace au bras de la rousse ? Elle n'aurait pas beaucoup d'efforts à faire pour se trouver un cavalier, et ce n'était qu'une question de temps avant qu'un prétendant ne s'arme de courage - si ce n'était déjà fait... Il fallait profiter du moment.

Le compliment est reçu avec un sourire de circonstance et l'invitation avec un contentement non-dissimulé, Nymeria saisie la main qui lui est proposée pour suivre son charmant cavalier jusqu'à la piste de danse, prenant place au milieu des camarades. La rouge se met alors en position, leurs deux paumes de mains en contact mais avec assez d'espace entre leurs silhouettes pour rester dans les standards de l'acceptable, ceci devant rester une danse entre gens respectable. Un morceau débute à peine lors de leurs premiers pas, douce mélodie les glissant de suite dans une l'ambiance féerique des fêtes de fin d'année, la sorcière ne sentant plus aucunes des tensions qui la tiraillais précédemment.

-C'est un beau morceau n'est-ce pas, on pourrait s'y perdre à danser jusqu'à la fin du monde.

Les yeux du ganté bondissaient de têtes en têtes, détaillant les visages et tenues des différents couples de cavaliers qui paradaient dans la Grande Salle. L’impatience se faisait grande, le trac aussi. Il s’invitait à la fête et immisçait des doutes dans l’esprit du Serpentard. Quel adolescent n’avait jamais pensé à la possibilité de ne pas voir apparaître sa partenaire le soir du bal ? Qu’il était inconfortable d’attendre… Mais le jeu en valait la chandelle.

Au-delà de l’horizon, introduite par les vagues d’élèves bordant son galion, la Castaway apparut comme la lumière d’un phare au milieu de la tempête qu’était le capharnaüm ambiant. Le regard de jais se fixa sur le pavillon pirate, vogua entre les traits de son visage bordés par l’argent. Ce sourire, qu’elle eût en l’apercevant, l’Ashworth ne tarda pas à le lui rendre. Une petite gêne suivit naturellement, tandis que quelques pas lui suffirent à rompre la distance qui le séparait encore de l’enfant des Océans.

« - Salut Navis. Tu vas bien ? Tu es… très jolie. » fit-il avant de détourner le regard un instant sur le reste de la pièce, peut-être gêné.

Soucieux des détails, l’écossais avait évidemment remarqué les petits yeux de sa camarade. Il se souvenait de leur balade nocturne de l’avant-veille et espérait qu’elle n’en était pas tombée malade.

Les mots du zélandais firent rayonner un peu plus Eleanor qui vit son sourire s'élargir un peu plus alors que ses joues s'empourprèrent légèrement bien que caché par la fine couche de font de teint qu'elle avait appliqué sur son visage.

- Evite de dire ça devant certains Serdaigles !

Un petit rire accompagna sa petite plaisanterie dont elle était visiblement satisfaite. C'était peut être aussi un moyen de cacher partiellement le plaisir que lui procura le compliment dont elle remercia l'auteur tout de même.

- Mais merci beaucoup. Ta tenue te va toujours aussi bien aussi.

Même si ce n'était peut être par choix qu'il continuait de porter le même ensemble, tout comme elle, ça lui allait toujours. Chic mais sobre, c'était pile ce qu'appréciait la rousse. Pour le reste la jeune adolescente était déjà heureuse : une soirée qu'elle aimait entre toute en plus en très bonne compagnie, elle savait d'avance que ce serait encore un moment dont ressortirait beaucoup de bons souvenirs.

Celonia écrivait, naturellement, régulièrement à ses parents, même si elle n'était pas non plus la plus assidue en la matière. Dans la mesure où il n'y avait pas vraiment de possibilités de les rejoindre pendant les vacances, les courriers étaient le seul moyen de vraiment maintenir un lien.

Pour le reste, la jeune Harpis ne put s'empêcher de sourire en voyant Jude essayer de cacher son geste maladroit. Elle en regrettait presque sa remarque mais, après tout, il valait mieux qu'il apprenne comment mieux faire le plus tôt possible ! L'oisillonne semblait à ses aises à ce bal. Non pas qu'elle y était habituée, mais, encore une fois, elle était une enfant facile à vivre. Elle parût ravie que Jude se prête à son petit jeu. Répondant à la révérence du jeune garçon par celle d'une "lady" en devenir, quoiqu'elle même peut être un peu gauche, elle opina ensuite en se fendant d'un large sourire, aussi candide que jovial.

- C'est d'accord, monsieur Leigh.

Dit elle sur un ton excessivement mielleux qui manqua de la faire pouffer de rire de nouveau. Finalement, elle tendit doucement sa main vers Jude, attendant que celui-ci ne s'en saisisse afin qu'ils puissent suivre leurs aînés dans le bal !