" Maison " de Mary Wright et sa fille

Le silence naissant ne fut que de courte durée puisque Eleanor décida d'en savoir un petit plus sur sa personne, sans non plus se montrer trop intrusive. Abigail n'y voyant aucun mal, elle répondit alors.

- Depuis 3 mois. Fin mai je crois.

Elle se contenta tout bonnement de répondre à la question de sa future camarade sans apporter aucun détail. Abigail continua de marcher et alors qu'elle semblait regagner le silence elle ajouta :

- Et toi ?

La jeune fille lui rétorqua sa question davantage par politesse que par volonté d'en savoir plus sur la vie d'Eleanor. De toute manière elle connaissait déjà plus ou moins la réponse, Eleanor était arrivée comme elle entre Janvier 1949 et Août 1949 puisqu'elles étaient toutes les deux des réfugiés.

Effectivement il y avait sûrement plus inspiré comme question. En tout cas Abigail avait passé plus de temps ici qu'elle. Ça se voyait dans sa façon de s'approprier les lieux en hésitant pas y mettre sa touche personnelle.

- Depuis trois semaines environ.

Eleanor chercha une autre question à poser, comme si il fallait absolument mettre à profit ce temps pour en savoir plus sur la créative jeune fille. Et soudain une lui vint, pas plus intéressante mais dont elle était curieuse de connaître la réponse.

- Dis moi... T'as déjà bu une boisson de Branchiflors ?

Elle se demandait bien si c'était juste elle qui avait horreur de ça et si c'était répandu chez les sorciers.

Trois semaines donc, elle emmagasina cette information, peut être que cela allait lui servir à un moment ou un autre. Le reste des conclusions qu'elle tirait de cette maigre information, elle les garda pour elle. Comme elle, il valait mieux éviter de lui demander les raisons de son arrivée, tous n'avaient pas forcément une jolie histoire à raconter. C'était son credo depuis qu'elle était arrivée à Pré au Lard, elle ne parlait absolument pas de ce qui se passait à l'extérieur, d'autres le faisaient bien assez pour elle. Elle se contentait d'observer les visages de chacun, il était plutôt facile de discerner les réfugiés victimes de ceux qui avaient simplement quitté leur domicile par prudence.

Eleanor pour faire vivre cette conversation lui posa une toute autre question, moins personnelle que la précédente, à laquelle Abigail semblait porter beaucoup plus d'intérêt finalement.

- Non je n'ai jamais goûté , j'ai entendu dire que c'était une spécialité d'une des tavernes du village, mais je n'ai pas encore mis les pieds dans ce genre d'établissements. C'est une plante magique, je ne savais pas qu'elle pouvait se consommer sous cette forme. C'est comment ?

Ainsi cela força son cerveau à envisager plein de boissons conçues avec différentes plantes de leur monde, elle frissonna à l'idée de consommer une boisson au Bubobulb.

La rousse avait beau y réfléchir, ça lui était impossible de lui faire comprendre le goût que ça avait avec des mots.

- C'est... Compliqué à décrire, disons que c'est particulier. Ça ne ressemble à rien de ce que j'ai pu goûter dans ma vie jusque là. Si t'as l'occasion va au Trois Balais pour y goûter mais fais attention, je ne pense pas que ce soit fait pour tout le monde.

Eleanor ne voulait pas démolir ce jus maudit dans le dos d'Ana, après tout Abigail apprécierait peut être comme la brune. En tout cas ce n'était pas compliqué de comprendre que c'était un moyen détourné pour dire qu'elle n'était pas friande de ce breuvage.

Abigail écouta attentivement les descriptions de la jeune fille. Vu la tournure de sa phrase couplé au fait que cette expérience semble avoir marquée Eleanor, elle était convaincue que la jeune fille n'avait pas aimé.

- Tu peux le dire si c'était mauvais, de toute façon rien ne vaut un jus de citrouille bien frais n'est ce pas ?

Le duo de jeunes filles commençait à approcher de l'arbre, il restait une montée à franchir pour se trouver ensuite au pied de l'arbre.

- On va dire que c'était pas forcément à mon goût... Mais je sais que d'autres adorent ça. Oui tu as bien raison ! Rien de meilleur !

C'était plutôt répandu et c'est ce qui lui avait le plus plu dans les boissons sorcières pour le moment. En même temps l'ingrédient de base était déjà plus goûtu que leurs autres plantes bizarres. Ainsi le dernier effort arriva, EleAnor n'était pas mécontente que ça se termine enfin.

Abigail était satisfaite qu'Eleanor partage les mêmes goûts qu'elle. Ce point boisson se termina puisque les deux filles arrivèrent au pied de l'arbre.

- Nous y voilà !

La jeune fille lâcha les cordes et commença a faire le tour du tronc d'arbre, elle n'avait pas sélectionné le plus grand pour ne pas rendre l'escalade difficile et dangereuse en cas de chute. La hauteur n'était de toute manière pas nécessaire, le plus important était de nouer des liens solides.

- Il ne me reste simplement à l'accrocher sur la branche que tu vois là, et le tour est joué. Tu pourras me lancer les cordes une fois là haut ?

Sans attendre de réponse, elle se mit à escalader l'arbre pour se rendre à la branche la plus proche et qui n'était pas si haute. Elle aura pris le temps d'abord de se défaire de sa poupée qu'elle installe au pied de l'arbre.

Eleanor poussa un soupire de soulagement, peu habituée à faire des efforts physiques il fallait dire, contrairement à sa camarade qui semblait plus aguerrie. Ce qu'elle ne ferait que confirmer une bref instant plus tard en montrant ses talents de grimpeuse.

- Euh oui mais comment ça là...

Elle avait bel et bien compris les mots d'Abigail, cette dernière n'avait pas peur des risques puisqu'elle monta sur l'arbre sans une once d'hésitation, n'attendant même pas de réponse de sa part. Ce qui impressionna la rousse autant que ça l'inquiétait. Se saisissant des cordes elle se plaça non loin de la casse-cou, prête à réceptionner une potentielle chute si il y avait besoin.

- Fais attention Abigail !

Abigail ne réalisait là aucune prouesse, l'arbre avait des prises faciles et ne présentait aucun risque lorsque le grimpeur était suffisamment vigilant, ce qu'Abigail était, elle manquait très rarement de prudence et ne démarrait rarement quelque chose sans être convaincue de réussir.  La jeune fille grimpa un bon mètre et s'arrêta sur la branche qui allait supporter sa future activité extérieure.  

- C'est bon ça devrait faire l'affaire. Tu m'envoies les cordes ? Si tu n'y arrives pas je peux les prendre avec ma baguette.

Elles étaient suffisamment grandes, il fallait simplement les lancer avec assez de forces pour qu'Abigail puisse les réceptionner.

Certes ce n'était peut être pas grand chose pour Abigail mais pour elle c'était déjà dangereux, elle n'avait pas l'habitude de faire ça, ce qui pouvait expliquer son excès d'inquiétude quand elle vit sa nouvelle connaissance grimper à l'arbre, elle ne se doutait pas que ça pouvait être ridicule.

- Oui je t'envoie ça !

Bien que l'idée de voir sa collègue utiliser sa baguette faisait grandement envie. Elle pouvait donc déjà utilisée sa magie comme cela ? La londonienne était décidemment pressée de pouvoir en faire autant. Mais elle ne voulait pas se montrer inutile dans sa tâche et utilisa la force de ses bras pour lui envoyer la corde en visant les mains d'Abigail. Elle n'était pas pas la plus physique mais elle arriverait tout de même à l'envoyer à cette distance sans soucis.

Eleanor parvient facilement a lui envoyer les deux bouts de corde qui permettront d'accrocher ce qu'on appelait a l'époque l'escarpolette, rebaptisée balançoire une fois le brevet déposé. Sur la branche elle commence a juger la meilleure façon d'accrocher tout ça. Il y avait des meilleurs façons de le faire que de nouer les cordes directement sur la branche mais elle n'avait que ses mains pour le faire. Abigail résonna pour elle même.

- Hmmm je crois que ces noeuds devraient faire l'affaire... La jeune fille se saisit d'une corde et l'enroule d'abord autour de la branche. Je fais d'abord un trou... Le basilic sort de celui ci... Puis tourne autour de l'arbre et entre de nouveau dans son trou !

Et le tour était joué, un noeud solide qui supporte les pressions et qui était également facile a défaire. Abigail réitère l'opération pour le deuxième bout de corde.

L'étrange maxime pour se rappeler de comment on faisait un nœud fit sourire la rousse, c'était exactement le genre de phrase qu'elle aurait pu entendre chez les moldus mais en version sorcière. Eleanor nota d'ailleurs la mention du basilic dont elle avait entendue le nom quelques jours plus tôt lorsque Ana avait tenté de plaisanter avec elle et James. Une créature capable de vous tuer d'un contact du regard apparemment, si encore cela était vrai et ne faisait pas partie de la boutade non plus.

- Attention de ne pas croiser son regard !

C'était certainement maladroit mais pour la première fois elle tenta de faire de l'humour sorcier. C'était peut être voué à l'échec et elle passerait pour une idiote mais dans le cas contraire elle pourrait renforcer sa couverture et se faire passer un peu plus pur une sorcière native.

Attelée a accrocher ce futur divertissement extérieur-qui elle est certaine lui apportera beaucoup de réconfort- elle ne fait pas attention à la blague d'Eleanor qui pourtant méritait une audience. Les noeuds terminés, elle tire avec toute sa force pour vérifier la solidité. Tout semblait fonctionner, elle se mit donc en tête de redescendre.

- De quel regard tu parlais ?

lui demande t-elle avant d'entamer sa descente.

Mlaheureusemet, trop occupée à attaches les cordes, Abigail n'avait rien entendu à ce qu'Eleanor lui avait dis juste avant. Elle s'éclaircit la gorge pour se répéter, espérant vraiment que le coup de ce fameux serpent qui vous tue en un regard était vrai. Tout du moins dans leurs légendes.

- Celui du Basilic ! Vu que tu l'as mentionné...

Devoir redire sa blague après coup ne risquait pas de faire franchement mouche, d'autant qu'elle n'était pas déjà sûr que ça serait une réussite sur le moment.

La jeune fille effectue un petit saut pour précipiter sa descente une fois le sol proche. Une fois sur la terre ferme, elle sourit à Eleanor, elle n'avait pas saisi la blague, son esprit beaucoup trop obnubilé sur sa "balançoire".

- Haha oui.

Répond-elle ainsi avant d'enchainer.

- Normalement ça devrait tenir, tu peux essayer si tu veux. Tu as juste à t'installer et faire aller tes jambes pour gagner de la vitesse.

Le rire lui semblait être plus poli qu'autre chose mais c'était certainement mieux ça qu'un blanc gênant. Décidément ses talents dans le domaine de la blague n'avaient jamais été son point fort hélas. Eleanor passa bien vite à autre chose face à la proposition d'essayer l'étrange manège.

- Avec plaisir.

A l'aide de ses pied sur le sol elle commença à initier un léger mouvement de balance avant de tendre les jambes mais l'effet n'était pas bien saisissant et ne durait qu'un temps, sûrement parce qu'elle n'avait pas l'expérience d'Abigail qu'elle regarda circonspecte.

- Je le fais mal ?

Voyant qu'Eleanor répondit favorablement à sa demande, Abigail commença à s'écarter, si la rouquine s'envolait il ne valait mieux pas rester dans les parages, sous peine de prendre une semelle sur le visage.

- Tu le fais à ta façon...

Elle ne voulait pas lui dire que c'était mauvais, heureusement Abigail était là pour l'aider. Elle fit le tour de l'arbre pour se placer derrière Eleanor.

- Je peux te pousser, c'est comme ça qu'on apprend. Le geste vient plutôt naturellement, tu étends tes jambes quand tu vas vers l'avant et il faut les replier quand tu retournes en arrière.

Elle attendait l'aval de la rouquine pour lui donner un petit coup de pouce.

Sa façon était bien nulle c'était évident, cela ne lui procurait pas beaucoup de sensations. Heureusement Abigail allait lui apporter toute son expérience en la matière et lui apprendre comment on faisait cette activité correctement.

- Oui je veux bien.

Avec la poussée de sa comparse réfugiée Eleanor savait que le balancement n'en serait que meilleur? Mais ce n'était pas tout ! Le secret se trouvait apparemment dans le positionnement et le mouvement de ses jambes pendant qu'elle se balançait. D'un hochement de tête assuré la rousse montra qu'elle avait bien compris les consignes. Ses mains attrapèrent les cordes fermement et elle annonça le top départ.

- Je suis prête.

Abigail attendit le "go" de sa comparse avant de se saisir des cordes.

- N'oublie pas de bien te tenir aussi.

Les cordes en mains, elle entama ce mouvement de bascule, la poussant doucement d'abord puis un peu plus rapidement. Abigail s'écarta en arrière et laissa Eleanor faire lorsqu'elle prit suffisamment de vitesse. Elle espérait que tout se passe bien, une chute de toute manière n'était pas bien grave. Enfin cela dépend de la partie du corps sur laquelle on atterit.

Ainsi elle laissa faire l'experte et appliqua avec beaucoup de sérieux ses consignes. Et... ça marchait super bien ! Bientôt elle commença à prendre un peu de hauteur, bien plus qu'avant déjà, et l'effet de balancier ne faisait qu'augmenter à chacun de ses passages et à ses mouvements plus assurés. Un sourire ravi se dessina sur son visage, cette façon était effectivement bien mieux que la sienne.

- C'est trop bien !

Grisée par cette sensation nouvelle, Eleanor décida de monter aussi haut qu'elle le pourrait sans s'inquiéter d'une potentielle chute. Après tout elle maitrisait fort bien maintenant.

Un léger sourire se dessine sur son visage, contente qu'Eleanor se plaise et parvienne à réaliser cette nouvelle activité, ce n'était pas si difficile de toute manière et il est vrai que la sensation était chouette.

- Si tu veux tu pourras graver ton nom dessus puisque tu m'as aidé à la transporter. Elle regarda derrière elle, vers les habitations. Je vais devoir te laisser Eleanor, ma mère n'aime pas que je m'absente trop longtemps !

Abigail joint les actes à la parole et amorçe son départ en petite foulée. Avant qu'elle ne se trouve suffisamment loin elle se retourne et lui fait un dernier signe de main. La jeune fille réalisa également qu'elle ne lui avait donné aucun conseil pour s'arrêter, tant pis...

Plongé dans son activité, elle tourna la tête vers la réfugiée. Malheureusement cette dernière devait déjà s'en aller, elle s'en voulait un peu qu'elle n'ait pas eu l'occasion d'essayer sa création mais les ipportunités ne manqueraient sûrement pas à l'avenir.

- Je n'y manquerai pas ! A bientôt Abigail, merci encore !

L'idée qu'Eleanor puisse laisser sa trace lui plaisait même si elle n'avait pas fait grand chose finalement. Se risquant à se tenir d'une seul main aux cordes, elle se servit de l'autre pour rendre son signe de main à la jeune fille avec un grand sourire. Pendant quelques minutes elle continua ensuite de se balancer très haut puis décida qu'il était temps de s'arrêter. Ce qu'elle réussit à faire sans soucis. Une fois à terre elle constata qu'elle n'avait rien pour écrire son nom sur l'arbre mais ce ne serait que partie remise. Elle n'attendit pas plus longtemps et s'en alla à sn tour, satisfaite de cette re ncontre.

L’Ashworth se souvenait bien de cette maison et de sa mémorable mésaventure. Ne voyant personne aux alentours, il s’avança et vint toquer à la porte. Le garçon était habillé sobrement, tout en noir, toujours vêtu de manches longues et de ses gants.

Après une minute à toquer sans réponse, l’Ashworth déposa un paquet aux pieds de la porte du « domaine » des Wright. Il ne savait pas vraiment si la maison était vide ou si ses habitants n’avaient simplement pas souhaité lui ouvrir, mais il ne comptait pas perdre plus de temps ici. Le temps filait et James devait se préparer pour la rentrée, prévue pour le lendemain.