Chez Mme. Irma

( https://inquisitionem.forumactif.com/t447-un-coin-d-herbe#9157 )

Le vert et la bleue débarquèrent devant le "jardin" partagé par deux maisons à l'architecture atypique. James se tenait là, bras croisés et fier de lui, et attendait que sa camarade lui pose une énième question.

La dite question viendra en réalité sous un seul mot. Quand le duo arriva, elle n'avait eu de cesse de s'enquérir de leur destination, James devant sans doute se venger de ce qu'elle lui avait fait "subir" il y a quelques semaines maintenant en l'emmenant dans le grand hall d'entrée.

-"Alors ?"

En effet, Maria-Esperanza l'avait bien compris, l'Ashworth savourait sa vengeance.

« - Bah alors c'est là, juste ici. »

Du doigt, le garçon pointa une trappe qui se trouvait quelques mètres devant eux. A l'époque, il était courant d'avoir des caves en extérieur et cela ne devait pas surprendre Maria plus que cela. L'écossais s'avança et l'ouvrit sans perdre plus de temps, révélant un escalier lugubre et pas franchement accueillant.

Et cela ne lui disait rien qui vaille. Un instant l'Infante releva la tête, contemplant la bâtisse du regard. Qu'était ce donc que ? Quelqu'un, un devin du moins, vivait là-dedans ? Ce n'était pas très encourageant mais maintenant que l'Ashworth avait ouvert la trappe, elle ne pouvait plus se défiler.

-"Tu passes devant ?"

Un simple rappel de politesse ... évidemment.

« - Pas très galant, mais si t'insistes... »

James le cachait bien, mais cette petite excursion lui foutait bien les jetons à lui aussi. Il fallait dire qu'il n'avait entendu que des rumeurs à propos de cette fameuse voyante, et se lancer dans l'inconnu à ce point n'était pas très rassurant. Il prit tout de même les devants, commençant à descendre les escaliers en direction de la tanière de Mme Irma.

« - Bonjour ?.. » lança-t-il pour prévenir de leur présence avant d'arriver en bas.

-"J'ai une bonne raison."

Lui aurai répliqué María-Esperanza avant d'entrer à son tour dans l'antre pas rassurée du tout de l'environnement dans lequel elle mettait les pieds. Elle s'assura de ne pas quitter James d'une semelle le temps que le devin, nommé Irma, n'apparaisse.

A peine eurent-ils commencé à descendre les marches, les semelles de leurs bottes claquant contre la pierre craquelée, qu’ils sentirent un frisson parcourir leur échine ; derrière eux, un coup de vent - la trappe s’était refermée seule. Aux paroles de James, lancées au travers d’un voile de mystère, une réponse, presque immédiate, comme si la chose se trouvant là les avait attendus.

- Des visiteurs…?

La voix était tout en volupté et subtilité, ronronnant chaque syllabe.

L'Infante observa droit devant elle, c'était de là d'où venait la voix après tout. Elle était plus qu'inquiète: ne venaient-ils pas de se jeter dans la gueule du loup ? C'était tout comme. Elle murmura à James.

-"On y va ?"

James déglutit. Voilà que son petit goût d’aventure venait de lui foutre un sacré coup de flippe. Mais après tout, ne vivait-il par pour ce genre d’instant ? L’écossais se retourna dans l’escalier, histoire de rassurer sa camarade d’un signe de tête confiant.

« - Oui… Nous sommes deux. » lança-t-il pour signaler leur présence.

Lentement, il descendit les dernières marches, inconscient du danger que pouvait peut-être représenter la sorcière qui les attendait en bas.

- Et bien entrez, lança la voix, presque autoritaire.

Hésitant, le garçon décala le rideau pour jeter un œil à l’intérieur de la pièce, puis s’invita dans l’espace des plus lugubres avant d’être sûrement suivi par la bleue.

Grâce et souplesse sans efforts, s’extirpa des ombres la fine figure d’une femme à la sauvage chevelure de jais, parsemée ça et là de rubans. Vêtue d’un ample vêtement bordeaux, révélant des épaules, avant-bras, chevilles et pieds nus. La femme avait une discrète espièglerie au visage, et les yeux d’un gris presque blanc lui donnant l’allure d’un fantôme. S’avançant lentement vers María et James, d’un pas félin, ses lèvres se mouvèrent en un rictus, et sa voix leur parvint comme le calme clapotis sur la surface d’un lac placide.

- Allons, suis-je si effrayante? Je vais être vexée…

Elle posa ses mains sur ses hanches, les divers bracelets à ses bras clinquant et tintant se faisant, alors qu’un sourire venait fendre l’énigme de son visage.

- Excusez-moi pour l’état quelque peu… particulier, de ce lieu. Sachez que je m’en désole également.

L'Infante ne savait que penser du lieu où ils arrivaient. Zyeutant à gauche à droite pour essayer d'en déceler des détails inexistants elle préféra s'avancer sur le tapis devant l'un des poufs après cette légère observation. Dans ce décor il ne manquait plus que le personnage principal qui ne tarda pas d'ailleurs à pénétrer sur la scène... María-Esperanza ne savait que penser de l'apparition de Madame Irma, aussi après avoir jeté un coup d'oeil à James, elle décida de plaquer un sourire avenant pour lui démontrer le contraire.

-"Absolument pas Madame."

Bien qu'en réalité ils avaient effectivement peur, enfin surtout elle puisqu'elle ne savait rien de l'état de James, mais son apparition tendait à réduire ce sentiment.

Tandis que ses narines se faisaient chatouiller par une odeur qui lui était encore inconnue, les prunelles incandescentes du plus rouge des verts s’amusaient à découvrir le lieu, plus qu’atypique. On ne pouvait deviner si le lieu était abandonné ou maintenu dans cet état, tant le bordel ambiant semblait étrangement ne pas être le fruit du hasard. Le hasard existait-il vraiment ? C’était l’une des réponses qu’une voyante pouvait donner, et la femme qui ne tarda pas à se dévoiler répondait à l’idée que l’on se faisait d’une telle praticienne. La peur du garçon s’était rapidement volatilisée, laissant de nouveau place à l’excitation qui rongeait son être. Il était pressé de voir ce que cette rencontre allait leur apporter. Sensible aux rumeurs, cela faisait plusieurs jours que l’Ashworth comptait venir, mais il lui avait manqué l’élément déclencheur qu’avait su devenir Maria.

« - Ce n’est rien madame. » avait-il répondu pile en même temps que sa camarade, créant une espèce de confusion par-dessus le malaise déjà présent.

Que devaient-ils faire, maintenant ? L’écossais s’avança sur le tapis après s’être rapidement déchaussé et rejoignit la table basse s’il y était invité, curieux.

Les rumeurs, les rumeurs… D’après celles-ci, cette dame n’était arrivée qu’il y a peu à Pré-au-Lard, et il lui arrivait de s’absenter longuement. Quant à ses pratiques, elle ne recevait apparemment que rarement des clients, mais l’un d’entre eux avait semble-t-il réussi à sauver son mariage grâce à elle…

La devineresse prit place sur un pouf, confortablement, assise en tailleur, et passa sa main sur la table basse ; se révéla tout un attirail qui jusque-là invisible - ou absent? - dont une sorte de boule fuligineuse dont n’échappait aucune lumière.

- Etant une voyante, je suis censée deviner la raison de votre présence. J’imagine que c’est ce qui traverse votre esprit? lança-t-elle avec un fin sourire.

Elle leur fera signe de s’asseoir si ce n’était pas encore fait.

James s'était alors installé sur un pouf en face de la voyante. Il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre, et se contenta de répondre à Irma après un échange de regard avec Maria-Esperanza.

« - Euh... Oui ? Enfin... On n'imaginait pas grand chose à vrai dire, on venait... par curiosité. »

L'Infante hocha rapidement la tête pour confirmer les dires de son camarade. Ils étaient venus par pure curiosité.

-"C'est exactement cela Madame ... nous .. nous sommes là par curiosité."

- Hm.

Elle souffla du nez.

- Amusant.

Elle s’étira alors, ses coudes venant se plaquer contre ses oreilles, avant de remuer les bras et la tête, comme pour se réveiller.

- Et bien je suppose que c’est à moi de vous guider? Qu’êtes-vous venus découvrir? Quelque chose en rapport à l’amour? Ce serait de votre âge, mais peut-être pas très intéressant…

L'Infante toujours debout, avait retiré ses chausses avant de s'avancer sur le tapis, en profita pour s'asseoir sur l'un des poufs libre à côté de James. Curieuse de voir ce que la devineresse pourrait bien dire à leur encontre, même si pour des questions dogmatiques elle n'en croirait pas un mot.

-"Que vous demandent les gens en général ?"

L'amour oui. Mais il y avait certainement d'autre chose; peut-être la réussite ou quelque chose de ce genre.

Les yeux du garçon voyagèrent de sa camarade à la voyante, approuvant sa question qui était pertinente.

Elle posa ses yeux blanchâtres sur María, les plissant subrepticement.

- L’avenir, généralement. C’est d’un barbant…

Elle retroussa légèrement le nez, un large sourire aux lèvres.

- Mais j’ai l’impression que vous n’êtes pas si dupes, alors, dites-moi ; que voulez-vous savoir?

María-Esperanza fronça les sourcils devant la réponse de Madame Irma. Pourquoi trouvait-elle "barbant" le fait que les gens viennent pour demander ce pour quoi elle exerçait ? Il y avait une logique qu'elle ne comprenait pas ici.

-"C'est étrange ..."

Mais elle se tût puis se tourna vers James un grand sourire aux lèvres.

-"Que pouvez-vous me dire de mon camarade à mes côtés ?"