Hall des banquets

Aslan venait il réellement d'avouer souffrir de graves troubles mentaux alors même qu'elle venait de lui expliquer que s'il espérait qu'un semblant de coopération existe avec elle, il fallait savoir combiner discrétion et la fiabilité ? Ce garçon était bizarre et la scène du bonhomme de neige qu'elle était parvenue à occulter et qu'Aslan s'était amusé à lui rappeler venait de lui sauter soudainement au visage. Pourquoi n'avait elle jamais donné leur chance à des individus comme Horacio ou Otto alors qu'Aslan avait bénéficié de sa tolérance ? Après tout, les deux devaient, très certainement, avoir des anecdotes intéressantes sous leur manche, eux aussi. Peut être même portaient ils des capacités tout aussi intéressantes à lui offrir. La différence entre les deux cas, c'est qu'Aslan était venu la rencontrer quand elle était triste et seule et que, dans de telles conditions, l'esprit est affligé de pensées parasites. Depuis, le jeune homme était passé entre les mailles du filet de la jeune Harpis qui était, pourtant, toujours prudente dans ses fréquentations. S'il aurait déjà été difficile de considérer pouvoir le maintenir comme une fréquentation digne de son cercle rapproché, Celonia réalisa bien vite que ses ambitions la concernant allaient bien au delà de ça.

Un haut-le-coeur la prit soudain ; Le garçon qui lui déclarait sa flamme dès qu'il le pouvait venait de lui dire qu'il pourrait la mettre en danger sans en avoir conscience, mais qu'il ne fallait pas lui en tenir rigueur.

- Je... Ses yeux s'écarquillèrent et elle secoua la tête, elle semblait complètement perdue. Comment suis-je supposée interpréter vos avertissements au juste ? Je suppose que je dois être reconnaissante pour l'avertissement, mais, juste...

Il n'était pas souvent arrivé que Celonia Harpis soit à court de mot mais, dans le cas présent, c'était le cas.

- Non. Si vous êtes vraiment affligé de la sorte et je pense que vous avez été honnête, il ne faut pas que...

Souffla-t-elle, un brin désemparée, incapable de terminer sa phrase. Heureusement, la jeune fille fut sauvée par le gong car la délégation anglaise était appelée à remonter. La jeune Harpis adressa un regard inquiet à Aslan, mais n'ajouta pas un mot. Pourquoi avait il fallu qu'un énième weirdo gâche son premier repas en Egypte ? Elle détestait vraiment sa maison.

Aslan semble en un instant perdre toute la confiance acquise, regardant de droite à gauche sans vraiment de direction comme une proie acculé, il ne fallait pas être bon en perception sociale pour comprendre que il avait fait peur à Celonia, même un nain ivre s'en rendrait compte au vu du changement brusque de tonalité dans la conversation. Aslan baisse les yeux dans son assiete, soufflant un long coup, commennt lui expliquer les choses ? Il ne pouvait pas simplement admettre être maudit, mais d'un autre lieu il ne pouvait pas non plus s'ouvrir à Celonia dans une perspective de camaraderie ou plus sans la mettre en garde des déssarois qui pourraient venir entre eux. Aslan était dans une profonde panique, il ne savait pas quoi faire, s'il ne disait rien il allait perdre Celonia pour toujours, mais s'il était honnête, elle ne le croirait jamais. Alors, poussé par le désespoir lui vint une idée, une folie.  Mais il se devait de le faire, il se devait de le faire pour pas que Celonia le prenne pour un simple malade mental. Peut-être que elle comprendrait enfin.  Alors il rentrera en communication télépathique avec Drekavac.

-Celonia... Je ne peux pas vous expliquer le mal qui me cause défaut. vous n'allez pas me croire, mais si vous me permettiez de vous faire démonstration...Je peux vous le faire voir. Magiquement voir.


Il essaye de rester digne dans sa voix, mais il semble profondément affecté, néamoins il n'a pas l'air de se moquer de la jeune fille.

-Autorisez moi et je vous fait voir Celonia, ainsi vous allez comprendre que je ne suis pas un fou.

Alors qu'elle se pensait tirée d'affaire, Aslan l'interpella de nouveau, cherchant à la convaincre de la pureté de ses sentiments. La jeune fille l'observa avec de grands yeux tandis qu'il lui demandait de l'autoriser à faire une quelconque chose. Elle n'avait pas envie de faire une scène ici, Celonia n'aimait pas avoir à se montrer agressive, même si elle savait très bien le faire.

- Nous sommes à peine arrivés, je suis fatiguée du voyage et, somme toute, très contente d'être ici. Je n'ai donc pas de patience à léguer aujourd'hui, alors...

Elle s'interrompit en remarquant de grosses gouttes commencer à perler sur le visage du croate. Un rictus singulièrement écœuré traversa alors le minois de la jeune fille. Même quelqu'un qui avait toujours fait de son mieux pour conserver une certaine bienséance et courtoisie avait ses limites. Aslan, par des choix plus que douteux, n'avait cessé d'éprouver les résistances de la jeune fille jusqu'à ce que les gonds ne sautent. Est-ce qu'elle était vraiment allée au bal avec ça faute d'autres cavaliers ? La gente masculine sera clairement une victime collatérale de cette conversation. Azura et Epidia avaient raison sur toute la ligne et elle s'en voulait de les avoir prises de haut.

- Bon sang, épongez vous et éloignez vous, vous allez me retourner l'estomac. Si ma robe était empestée, votre condition mentale serait le dernier de vos soucis.

Dit elle en un claquement de langue aussi courroucée qu'il n'était franc. Il était rare que le masque de la jeune Harpis ne tombe, mais l'exploit venait d'être réalisé. Celonia pressa le pas pour rejoindre ses autres camarades de la délégation, elle ne voulait plus entendre parler d'Aslan.

Pendant que Celonia le détruisait dans les règles de l'art dans le monde réel, Aslan subissait les conséquences de sa dispute mental avec Drekavac dans sa tête en parallèle. Assailit de toute part, aussi bien physiquement que spirituellement, Aslan ne savait plus où donner de la tête. Pendant un instant il cru voir flou, manquant de s'écrouler tête contre table.

Il resta un long moment à fixer le vide , ou plutôt fixer la table droit devant lui , sans rien dire. Les deux mains apposées contre la nappe pour le soutenir, faisant fît des regards autour de lui.   Il resta ainsi , dans son monde, dans son malheur, bien après que Celonia soit partie, sans doute assez pour attiser quelques regards curieux devant le déséquilibré en sueur qui fixe sa table.

Encore une humiliation. Encore une moquerie, encore un échec. Les larmes de rage coulent sur les joues de Aslan alors qu'il pense avec fureur à la scène qui vient d'avoir lieu, aussi bien dans sa tête que dans le monde réel. Il se refusait de l'accepter, il se REFUSE de se dire que c'est la réalité.

Quittant finalement la salle en trombe, le regard rempli de haine, Aslan s'en ira une rage singulière dans l'âme, c'était l'humiliation de trop.  Ils allaient tous payer. Plus jamais on ne se moquera de Aslan.

Si James était l’un de ceux qui se montraient le moins, siégeant souvent dans les quartiers réservés aux élèves de sa délégation, il n’en oubliait pas de se sustenter pour autant. Il rejoignit le Hall des banquets au cours d’un après-midi afin de reprendre des forces, piochant quelques fruits à droite à gauche.

Dans son dos, James pouvait soudainement ressentir une présence, non, deux présence. Et sans qu’il n’est le temps de ce retourner, il put entendre :

- Ne serait-ce dont pas le talentueux sorcier dont Zverotić nous a parlé ?

S’adressant au jeune homme à la crinière de feu, la deuxième présence se révéla :

- J’espère que celui-ci ne tient pas rigueur aux miens de l’épisode des punaises magiques de lits.

Sûrement James s’était tourné vers eux, mais les deux conversaient comme si James leur était invisible.

- Je crois me souvenir que Zverotić m’avait indiqué qu’il avait eut à subir un lourd tribut lors des événements qui ont succédés à cette infestation… Qu’il est pénible de savoir que certains parmi les sorciers trahir les leurs…

À cette dernière phrase, le français avait enfin daigné tourner son regard en direction de l’écossais et attendait la réaction de celui-ci.

Alors qu’il venait de récupérer une pomme et qu’il s’apprêtait à partir, une voix inconnue s’éleva dans son dos et capta son attention. Si la méfiance était un réflexe naturel chez l’écossais, le nom d’Alija suffisait à baisser une première garde, celle qui l’aurait poussé à se montrer désagréable avec les deux silhouettes qu’il découvrait de son regard onyx. Deux hommes aux traits bien distincts, dont il ne connaissait ni l’identité ni même la nationalité. Si l’on pouvait aisément sortir les japonais de l’équation, il était parfois difficile de discerner la délégation des élèves au faciès. Le roux, à son style, paraissait être à domicile, tandis que l’autre mentionna d’emblée l’épisode fastidieux des punaises de lit. L’enquête s’arrêtait là.

Il n’apprécia pas forcément leur façon de faire, toisant les deux inconnus tandis qu’ils conversèrent entre eux quelques secondes. Était-ce là une manière d’accoster quelqu’un ? James estima qu’ils s’amusaient un peu, pas forcément étonnant s’ils étaient réellement des proches du Zverotic.

« - N’est-il pas ? »

L’Embrasé avait répondu comme s’il concluait lui-même la phrase du français. Il était bien évidemment d’accord et enchaîna, curieux d’en savoir plus sur cette approche.

« - J’ai l’impression d’être celui que vous cherchez, en effet. Vous êtes ? »

Cela ne lui plaisait pas d’être le seul être à découvert dans cette conversation, surtout qu’il ne savait pas ce que son frère avait pu dire à son sujet. Ce dernier connaissait l’importance que James vouait à son intimité, et l’écossais n’imaginait pas un monde où le Zverotić s’était confié à n’importe qui à ce sujet.

- Tu extrapoles, nous n’étions point à ta recherche. Mais à la vue d’un brun au regard vif et en toute occasion longuement vêtu, nous avons compris qu’il s’agissait du fameux compagnon de Zverotić.

En retrait, Alpaslan n’avait dit mots.

- Je suis Clovis, de la noble et vénérable famille Garithos.

Il lui tendit la main.

Son regard onyx voyagea entre ses deux interlocuteurs. Clovis… Ce prénom lui disait quelque chose. Alija lui avait en effet déjà parlé du français au détour d’une conversation, sans trop entrer dans les détails. Ainsi, James ôta lentement le gant qui couvrait sa dextre, révélant sa main meurtrie aux yeux des inconnus qui, peut-être, n’attarderaient pas leurs regards sur ses blessures. C’était là un signe de politesse évident.

Il serra la main de l’élève de Beauxbatons alors qu’il reprenait la parole.

« - James, Ashworth. » fit-il plus sobrement, d’un flegmatisme seulement bafoué par son regard brûlant.

Un signe de tête respectueux re-salua le roux, qui ne semblait pas spécialement ouvert à une poignée de main de son côté. Il renfila alors son gant, tandis qu’il attendait sa présentation.

Le français adressa au turc un hochement de tête positif puis reporta son attention sur James.

- Des affaires nous appellent, nous aurons l’occasion de faire plus ample connaissance. En attendant, puisse la magie veiller sur toi.

Le français et le turc s’en iraient si l’écossais n’avait rien d’autre à ajouter.

Le regard de l'écossais se plissa légèrement.

« - Puisse-t-elle veiller sur vous. » répliqua-t-il, alors que ses yeux se focalisaient maintenant sur celui qui ne s'était pas présenté.

Il hocha simplement la tête et les regarda finalement s'en aller. Étrange première rencontre... James finit de piocher dans différentes corbeilles puis s'en alla.