La Grande Bibliothèque

Dans le sous sol de l'Académie trônait cette immense pièce aux murs de pierre et garnie d'étagères en bois montant jusqu'à plafond. Elles étaient remplies à ras bords de parchemins empilés les uns sur les autres entre des planches disposées en croix, comme aux temps anciens. On trouvait également des étagères plus classiques contenant des livres. La pièce était bien éclairée, avec des sources de lumière magique brillant comme des lucioles un peu partout. Même les tables en étaient équipées, et il était possible de déplacer ces "lampes" pour travailler.

Compte tenu de la masse de connaissances entreposée ici et de leur rangement peu intuitif sous la forme de parchemins, une armée de bibliothécaires et d'assistants étaient chargés de fournir aux élèves les livres dont ils avaient besoin, et qui étaient consignés dans d'immenses registres. Il y avait des parchemins et des livres de toutes les langues: les plus anciens étaient en grec et dans un latin de plus en plus transformé à mesure que la date d'écriture avançait, ainsi, les plus récents étaient en arabe ou en langue égyptienne. On trouvait quelques livres en anglais, en français, en allemand... mais ceux ci étaient beaucoup plus rares proportionnellement au reste.

Pour fluidifier leur séjour, on avait fourni aux élèves un épais grimoire: un Transposateur. C'était un ouvrage vierge, enchanté pour traduire un livre. Il accueillait le texte traduit d'un livre, et nécessitait pour cela un livre source - destiné à être traduit - et un livre de traduction de la langue de base vers la langue que l'on souhaitait traduire. Alors, le Transposateur se mettait à se remplir du contenu traduit du livre auquel on l'avait lié. Ce sont des dispositifs chers de par leur complexité et leur niveau d'automatisme. Ils peuvent être réécrits à volonté car l'écriture traduite finit par s'effacer, ce qui limite l'exportation durable des connaissances.

L'émerveillement se révélait aussi ténu qu'une nuance, face à l'idylle qui enveloppait l'Égypte, une illusion presque irréelle et fugace. À chaque croisement de couloir, dans chaque murmure des vents chargés d'histoire, se cachait une anecdote, une légende, une part de ce passé millénaire, chaque scène semblait extraite d'un conte gravé dans les méandres du temps. L'Égypte, terre d'énigmes et de merveilles, semblait elle-même née de l'encre des scribes antiques, sa beauté éclipsant toute réalité, comme si le voile du temps s'était écarté pour révéler un monde intemporel.

C'est ainsi, après avoir échangé grâce à l'amulette et absorbé la potion de Babel pour discourir, que Dante franchit le seuil majestueux de la Grande Bibliothèque. Illuminée d'une aura mystique, parée d'un décor capable de captiver l'esprit des shebabs autant que ceux des cheikhs, elle le conduisit dans ses profondeurs. Les rayons de soleil, filant à travers les fenêtres à l'architecture nouvelle, peignaient des tableaux vivants sur les vieux parchemins et les reliures usées, tandis que le parfum des livres anciens emplissait l'air, un mélange envoûtant de poussière, d'encre et de secrets oubliés. Loin de la grisaille monotone de la bibliothèque de Poudlard, il se laissa happer par ce monde cryptique, guidé par les lueurs dansantes éclairant son chemin, plongeant ainsi dans les arcanes labyrinthiques du savoir.

Armé de son Transposateur, une relique des temps modernes dont la livraison avait suscité son incrédulité, tant l'objet enchanté se révélait être une invention de génie, Miysis poursuivait son chemin en quête de l'inconnu. À un tournant, il rencontra un assistant, un gardien de ce sanctuaire de connaissances millénaires, et, sans hésitation, l'arrêta pour demander où trouver les ouvrages de matières étudiés par les élèves de l'Académie égyptienne. Un comparatif entre le cursus des Égyptiens et celui de Poudlard pourrait éclairer bien des mystères. Car devant probablement affronter le Champion de Nedjet-Ptah, les vérités gravées dans les parchemins et les livres constitueraient sa boussole, dévoilant les secrets du savoir et les échelons de ses pairs.

Dante aurait fort à faire, puisqu'il lui fut expliqué que les égyptiens étudiaient notamment les Soins Magiques pour ceux le désirant, les Runes et les Artefacts, les Sortilèges et Enchantements, la Métamorphose, la Conjuration, le vol sur tapis, l'Histoire de la Magie, la Divination... En somme, les mêmes matières qu'à Poudlard, à peu de choses près.

À l'exception des Soins magiques, des Runes, des Artefacts et du Vol sur tapis, il y avait peu de différences dans les matières qu'ils avaient étudiées, notamment pour leurs BUSEs à Poudlard. Dante décida donc de mettre de côté les matières communes pour se concentrer sur celles qui les différenciaient. Il s'attarda sur les ouvrages traitant des sujets qu'il connaissait peu, à savoir les Artefacts, les Runes et les Soins magiques. Quant au Vol sur tapis, il préférait le laisser aux Balkans et aux autres cultures orientales. N'ayant que peu d'intérêt sur ce moyen de locomotion assez excentrique.

Les Soins Magiques (ou Cours de Soins) étaient basiquement des cours de médicomagie, peut être un peu plus poussés et au cursus plus long qu'à Poudlard (qui n'était disponible qu'en 5eme - 6ème année). S'il bouquinait un peu là dessus Dante prendrait connaissance du lien avec l'héritage de la médecine antique, romaine et arabe qui au fil des siècles avait intégré cette discipline dans les cursus estudiantins sorciers et moldus.

Concernant les Runes, Dante apprendrait ceci:

La magie Runique offre ce que l'écriture a offert aux Hommes : la durabilité. En plus d'une simplicité de fonctionnement une fois créée. La magie Runique est surtout utilisée pour la création de Glyphes, ces gravures magiques dans des alphabets inconnus, offrant tous types d'enchantements ou d'effets magiques, que ce soit pour combattre lorsqu'elles sont apposées sur une arme ou une armure, ou pour le confort de vie, lorsqu'elles sont apposées sur une dalle pour générer de l'eau par exemple... Certes, comparable aux enchantements bien connus du monde Sorcier Occidental, la Magie Runique est en vérité très peu connue et encore moins accessible.

Cela restait, au demeurant, un cours assez théorique, et parfois cryptique, comme pouvait l'être la Divination à Poudlard. Un art complexe et élitiste, pour des perspectives alléchantes à ses quelques élus.

Le cours d'étude des artefacts magiques était à l'instar des soins intrinsèquement lié au monde sorcier oriental, à l'histoire riche et féconde en productions magiques aujourd'hui oubliées. C'était essentiellement un cours d'histoire mêlée à de la théorie sur les enchantements, avec peut être un peu plus de pratique puisqu'il pouvait rarement y avoir des expéditions afin d'entrainer les jeunes à l'exploration du passé sorcier.

Après une lecture minutieuse des points qu'il avait jugés dignes d'intérêt, le Rouge prit soin de consigner quelques notes personnelles dans son journal de bord, un compagnon de voyage fidèle qui ne le quittait jamais. Pour Dante, la magie runique représentait une variation captivante des enchantements étudiés à Poudlard, une forme d'art envoûtante, bien plus concise et mystique que les sortilèges fastidieux. Il ressentait en elle une noblesse, une pureté qui la distinguait des pratiques magiques conventionnelles. Ce qui le captivait particulièrement, c'était le souvenir de la rune qu'il avait lui-même gravée sur le pommeau de sa baguette de premier prix, un cadeau affectueux de ses parents lors de son entrée à Poudlard. Alors qu'il l'examinait à nouveau, les souvenirs affluaient, et la signification de cette rune représentant le numéro "7" prenait tout son sens. À l'époque, il n'avait guère accordé d'importance à ce geste, laissant la superstition et les mystères entourant cet art inexploré le fasciner. Peut-être, se dit-il, que le Destin lui avait déjà réservé une rencontre inattendue avec la magie runique.

Conscient qu'il ne trouverait pas davantage d'informations sur les mystères de la runologie, Dante décida d'aborder un assistant qui s'affairait à ranger différents ouvrages près du rayon où il avait consulté ses livres sur le sujet. Il souhaitait savoir qui, au sein de l'école, serait le mieux placé pour le renseigner sur la magie runique.

- Bonjour, si ce n'est pas trop indiscret, commença-t-il en désignant l'ouvrage sur la magie runique avant de reporter son regard sur l'homme, pourriez vous me dire qui serait le plus qualifié pour m'en apprendre davantage sur ce sujet au sein de Nedjet-Ptah?

L'assistant, un copte, salua Dante comme de rigueur.

— Sans problème. Répondit l'assistant. Le Professeur Darius Shah enseigne les Runes, ainsi que l'étude des artefacts magiques. J'ai cru comprendre que vous aurez cours avec lui durant votre séjour ici.

Dante enregistra soigneusement le nom plutôt facile à retenir du professeur dans un coin de sa tête avant d'incliner la tête en signe de respect. Puis, se tournant vers l'assistant, il poursuivit :

- Dites-moi, l'Égypte est-elle réputée pour son expertise dans certaines arcanes magiques ? Peut-être des pratiques qui diffèrent de celles communément enseignées dans le monde magique ?

Le Griffon avait soif d'en apprendre davantage sur les variations et les spécificités des différentes traditions magiques à travers le monde. Il était conscient que certains peuples, au fil de l'histoire, avaient développé des compétences uniques en fonction de leur environnement ou de leur culture. Par exemple, Fidel Dadis Bagamba, était de ceux maîtrisant la magie sans l'usage de baguette car c'était ainsi qu'ils apprenaient en Afrique. Plus récemment, il avait découvert aussi l'existence des mages musiciens, venant d'une contrée lointaine, capables de produire de la magie à travers leurs instruments de musique.

Dante était avide d'explorer ces différences et de comprendre comment elles influençaient la pratique de la magie à travers le monde, et pourquoi pas peut être, à son tour s'y exercer un jour.

— J'ignore quelles arcanes sont enseignées dans votre pays, entama l'assistant, mais l'Egypte est forte de son héritage en médecine et en enchantements au travers des glyphes, des runes et des artefacts, qui reposent sur l'arcane d'Enchantement mais se basent plutôt sur la forme écrite en lieu et place de la gestuelle.

Dante maîtrisait normalement ces concepts, et le discours de l'assistant faisait écho aux propres connaissances de Dante sur les ntions de la magie enseignées à Poudlard.

Rien de nouveau sous le soleil égyptien. Malgré tout, le Griffon accueillit l'information avec un sourire empreint de gratitude, remerciant l'assistant d'un chaleureux « choukran ». Puis, tournant les talons, il se dirigea vers les étagères pour ranger les ouvrages empruntés. Cette brève incursion dans les trésors de la bibliothèque lui avait permis d'en apprendre davantage sur les points forts des élèves égyptiens de l'Académie. Il comptait bien mettre à profit ces connaissances lors du prochain cours avec Darius Shah. Sa curiosité insatiable et son désir d'apprendre le pousseraient certainement à rencontrer ce professeur dans un avenir proche. Une fois les livres et parchemins remis à leur place, Dante quitta la Grande bibliothèque, prêt à poursuivre sa quête de savoir dans les méandres de l'académie.

La jeune Harpis était curieuse de découvrir les savoirs que pouvaient posséder cette civilisation. Evidemment, une vie entière ne suffirait guère qu'à effleurer la surface de tout ce qui pouvait bien être entreposé ici. Cela dit, certains sujets très spécifiques étaient dans le viseur de la jeune femme. Avançant calmement entre les rayons, vêtue comme la rigueur des lieux l'exigeait, elle chercha du regard un assistant afin de lui demander : S'ils possédaient des ouvrages traitant des capacités de "clairvoyance" en divination. Evidemment, son but était, toujours, d'en apprendre plus sur ses capacités.

On fournit effectivement des ouvrages à Celonia, hélas ceux ci ne lui apprirent guère plus, dans l'essence, que ce qu'elle avait pu lire à Poudlard. Toutefois, elle pouvait lire des références bibliographiques obscures à des livres qu'elle ne trouvait pas dans cette bibliothèque. Etrange... l'Egypte n'était apparemment pas avares de mystères.

Une manière vaguement différente de raconter les mêmes choses. Rien de concret, donc. La jeune Harpis nota toutefois que certaines des sources citées n'étaient pas trouvables ici. Des ouvrages peut être excessivement rares ou alors interdits... Dans un cas comme dans l'autre, elle veilla à noter ces derniers puis se consacrera à des études plus conventionnelles quelques heures avant de quitter les lieux.

Ce voyage en Egypte n'était pas un motif pour vagabonder et laisser de côté les révisions. Si Abigail n'avait pas inscrit son nom dans la Coupe, c'était aussi pour se donner davantage de temps pour ses ASPICs. En s'éparpillant, ses résultats risquaient de diminuer, ce qui était intolérable. Après une bonne séance pratique près de l'oasis, la jeune femme s'était enfermée dans la bibliothèque pour continuer son apprentissage.

Depuis l'arrivée du bateau, c'était à la bibliothèque qu'elle se rendait le plus souvent. La jeune femme avait laissé sa table seule le temps de trouver avec son transporteur, le ou les parchemins susceptibles de l'intéresser. La jeune femme ne savait pas vraiment par ou commencer ainsi elle errait dans cet oasis de savoir. Elle se demandait si une Particularité pouvait leur permettre d'enregistrer rapidement le contenu d'un livre. Il lui arrivait également d'adresser des signes de tête polis à l'encontre des assistants.

Impensable de ne pas voir María dans ce qui était le hall du Savoir. Après avoir passé les premiers jours à découvrir et apprivoiser son environnement, l'Infante passa enfin son temps libre dans sa nouvelle maison. Et si la bibliothèque de Poudlard était hautement plus impressionnante, celle-ci, l'adolescente se l'avouait, tenait assez la comparaison. Bien sûr elle rejoignit dès qu'elle la vit Abigail, sourire, aux lèvres, il lui semblait que dernièrement celle-ci l'évitait, mais peut-être que María se faisait des idées...

-"Alors ? Quel est le programme aujourd'hui ?"

La jeune femme continuait sa ronde dans la Grande Bibliothèque et alors qu'elle s'arrêta vers une allée d'étagère dont les parchemins traitaient des runes. Non enseigné à Poudlard, cette matière avait naturellement séduit la Serdaigle, elle retrouvait dans les runes ce qu'elle appréciait dans la magie, l'animation de l'inanimé, la transformation, l'ajout de caractéristiques nouvelles à un ou plusieurs objets. Alors qu'elle s'apprêtait à fouiller davantage, une voix bien connue de la jeune fille l'interpella.

Abigail se retourna vers elle, un peu honteuse de s'être rendue dans la bibliothèque sans ne lui avoir tenu mot. Habituellement, elles passaient une bonne partie de leurs révisions ensemble, cela permettait de se questionner ou d'approfondir les points qui pouvaient leur poser problème.

- Oh Maria !

Même si elle ne l'avait pas convié à cette séance, elle était néanmoins heureuse de voir son amie.

- L'étude des runes. J'ai vraiment apprécié le cours d'introduction de Professeur Shah.

Ce pourquoi elle souhaitait faire les efforts pour arriver bien mieux préparée lors du prochain cours. Concernant les doutes de Maria sur cette sensation d'être évitée, dernièrement Abigail appréciait passer du temps seule, que ce soit dans cette école ou en dehors.

-"Ah oui. Excellente idée !"

Pour sa part elle attendait de voir un peu plus de contenu avant de se prononcer sur son appétence pour cette nouvelle matière. Mais avec sa curiosité naturelle, María ne doutait pas de finir par apprécier ce nouveau cursus.

-"Je commence à appréhender les possibilités que tu pourrais avoir en mélangeant enchantements et les runes."

Après un soufflement amusé, Abigail répond.

- En mélangeant les enchantements et les runes, les possibilités sont presque infinies

La seule limite était son imagination.

- Nous avons une grande force, mais j'ai l'impression que nous n'en faisons pas assez. Je pense souvent à ce sceptre de Cromwell qui annulerait la magie, qu'est ce qui nous empêche de créer des objets d'une puissance équivalente ?

Abigail avait déjà pensé à quelques façons de contourner l'objet mais sans de profondes études du bâton en question, elle ne pouvait pas être certaine que cela fonctionnerait.

La question qu'Abigail venait de poser méritait une réponse. Et de cette réflexion dont l'Infante venait de plonger, elle en ressortit quelques secondes après un haussement d'épaules, légèrement fataliste. Un aveu terrible sur leur condition mais aussi les capacités de Poudlard à enseigner l’entièreté du champ des possibles dans le spectre de la magie. L'absence de ce genre de cours dans leur académie était la première réponse lui venant en tête de suite ... et sans doute la plus importante de son avis.

-"J'imagine que notre absence de connaissances dans ce genre de domaine n'aide pas beaucoup non plus."

Peut-être qu'Abigail aurait vocation à en trouver des propriétés rendant obsolètes les pouvoirs, que l'on qualifierait de divin chez les moldus, du bâton de Cromwell. Peut-être.

-"Heureusement que nous pouvons apprendre des autres cultures. Je me demande si dans les autres écoles ils ont des matières nullement enseignés ailleurs, du moins pas à Poudlard. Je n'ai pas eu le temps encore de discuter avec les autres élèves, ils doivent avoir d'autres spécialités qu'ils nous seraient sages de connaître aussi."

La magie était tellement vaste, illimitée qu'il était difficile de saisir et maîtriser tout son plein potentiel. Que les moldus puissent réussir à créer des armes si puissantes en l'espace de quelques années générait une frustration dévorante.

- Et qui sait, peut être que plus tard nous pourrons proposer des nouveaux cours à Poudlard, inspirés de ce que nous avons appris. Les runes par exemple.

C'était un exemple parmi tant d'autres. La jeune femme se désintéressa de son amie et de la conversation quelques secondes pour continuer à chercher les parchemins qui l'intéressaient situés un peu plus loin.

Un hochement de tête plus tard, María se retourna aussi pour faire le tour du rayon et voir les rouleaux, manuscrits, incunables disponibles afin de parfaire ses connaissances. Plusieurs fois elle fit le tour des rayons à la recherche de la perle rare quand après plusieurs minutes de recherche -infructueuse- jusque là, l'adolescente tomba sur un ensemble de vieux parchemins croulant sous la poussière. Outre l'image qui s'en dégageait -de quelque chose dont personne ne se servait ou très rarement- et qui émut l'adolescente, ce qui l'intéressa grandement furent les caractères de l'alphabet grec ancien. Elle se décida grâce à cela à prendre la pile, avec une attention certaine pour ne pas abîmer les précieux ouvrages avant de s'en retourner chercher Abi quelques longs instants après.

-"Tout va bien d'ailleurs Abigail ? Je ne t'ai pas beaucoup vu dernièrement ..."

Et l'Infante avait décidé de mettre les pieds dans la soupe directement. Elle s'inquiétait pour son amie, n'ayant partagé sa couche pendant les jours de la traversée, loin de leurs petites habitudes, peut-être quelque chose était-il arrivé ? Auquel cas pouvait-elle lui apporter son aide ?

Après plusieurs minutes à tenter de déchiffrer les parchemins ayant le potentiel pour la captiver à l'aide de son transporteur, la jeune femme se saisit de deux, trois rouleaux qui allaient avoir la chance de l'accompagner pour la prochaine heure. Elle fut ensuite rejointe par son amie qui semblait s'inquiéter pour elle... Cela faisait longtemps qu'elles n'avaient pas eu une grande conversation et Abigail était la principale responsable de cette situation. La Préfète soupira, embêtée par le peu d'attention qu'elle portait ces derniers temps à l'Infante.

- Désolée Maria, j'ai été occupée ces derniers temps.

Habituées à partager la même chambre, elles avaient été séparées sur le bateau, cela devait également être pris en compte.

- Montre moi ce que tu as pris, ça a l'air fascinant !

Ajoute-t-elle dans la foulée.

Un simple commentaire, nébuleux, fut sa réponse.

-"Oui, il y avait de quoi avec tout ce qui nous est arrivé dernièrement."

Difficile pour l'Infante de croire ou non les dires de son amie et de toute façon elle ne montra rien d'autre qu'une façade, semblant absorbée dans sa lecture en grec ancien. Étrange dualité ressentie à cet instant, d'un côté María était triste: l'impression qu'Abigail n'allait pas bien persistait, créant un flou gigantesque, et qu'elle n'osait pas se confier -ou alors la jugeait-elle totalement indigne d'être sa confidente, de l'autre ce qu'elle lisait la passionnait réellement, bien qu'elle avait du mal à en comprendre exactement les tenants et aboutissants.

-"Je crois que c'est un palimpseste."

Un parchemin utilisé dont les premières inscriptions avaient été effacé au profit de nouvelles, donnant cet aspect atypique.

-"Mais les scribes ont mal fait leur travail : j'arrive encore à déceler les premiers textes écrits, ce qui rend le nouveau plutôt illisible ..." Fronçant les sourcils, l'effort qu'elle devait faire pour lire et traduire le contenu était considérable, sa posture la trahissant. " ... et je m’emmêle les pinceaux. D'autant plus que les deux textes, n'ont, semble-t-il, absolument rien à voir."

Après un soupir, elle se releva et décala légèrement le rouleau de parchemin pour le rendre accessible à Abi. ( Image )

-"Je crois reconnaître un morceau de l'Odyssée, notamment le passage avec la sorcière Circée, mais impossible de comprendre ce qu'il y avait à la base. Les quelques caractères et mots encore visibles ne me sont d'aucune aide."

La jeune femme se pencha sur la trouvaille de Maria, déjà curieuse de lire ou essayer de déchiffrer à son tour les écrits du morceau de parchemin. Ses yeux se plissèrent, en effet les scribes avaient fait un travail de cochon, les mots s'entremêlaient et il était difficile de se focaliser sur les écritures les plus récentes.

- Et j'imagine que ce Transposateur ne nous sera d'aucune aide.

La page était pratiquement illisible, le transposateur ne pouvait donc pas faire de traduction précise.

- Je crois que tu as raison ! Αἰαία inscrit ici doit faire référence à Aeaea, l'île sur laquelle elle a vécu.

Circée la sorcière qui changeaient les marins moldus en cochon... La jeune femme ne put s'empêcher de penser à James et la manière dont il qualifiait les moldus de porc plus jeune.

- Elle avait une bonne façon d'accueillir les étrangers sur son ile, on devrait s'en inspirer avec l'Inquisition.

Plaisante-elle.

Une bonne idée à la base, mais hélas, et l'enchanteresse s'en était aperçu, le transposateur ne leur serait d'aucune utilité oui: le parchemin, usé et craquelant à certain endroit ne permettait pas une traduction "magique" rapide. Elles devraient ici surtout utiliser de la bonne vieille "huile de cerveau" afin de s'en sortir avec le texte. Mais maintenant que les deux Serdaigles en avaient compris l'idée générale, cela serait plus aisée d'obtenir ce qu'elles souhaitaient toutes deux.

-"C'est exact. J'avais vu son prénom quelques lignes plus haut ainsi qu'un numéro de chant au tout début."

Son doigt pointa le nom de la sorcière ayant trompé les moldus, à la différence du rusé Ulixes, héros de l’œuvre : Κίρκη. Quand au numéro, il était visible en haut du parchemin. L'Odyssée, Ὀδύσσεια , étant une épopée d'un aède, se chantant à l'oral donc, dont les divisions étaient énumérées en numéros de chant. Ici c'était le Chant numéroté 10.

-"Mais cela voudrait dire accueillir des moldus à Pré-Au-Lard." Lui répliqua María en relevant la tête vers elle. "Je n'ai pas vraiment envie de les voir chez-nous. Même transformés en cochons."

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