Visite James/Eleanor

Visite du lundi matin.

L’Ashworth était confortablement installé sous un drap qui remontait jusqu’au-dessus de ses épaules et semblait dormir. Sa baguette était posée sur sa table de chevet.

La main sur le front de l’écossais avait suffi à le sortir de son sommeil. Ses yeux s’étaient ouverts tandis que la Folsham partait chercher de l’eau, et un léger soupir s’échappa de la bouche de l’adolescent lorsqu’elle fut reconnue. Il avait eu le temps d’apprendre ce que sa camarade avait fait pour lui. Silencieux, il laissa la poufsouffle revenir à lui sans engager la discussion.

Sur sa table de chevet, il n’y avait que deux livres en plus de sa baguette et d’un verre vide.

Un sourire vint accueillir le réveil de James alors que la rousse s'attela à remplir son verre d'eau au cas où il aurait soif. Elle ne voulait pas non plus brusquer le Serpentard et le laissa émerger de son sommeil pendant quelques dizaines de secondes avant de finir par souffler à voix basse :

- Tu m'as fait très peur James.

Son regard se tourna vers les deux livres. Plutôt que de partager ses inquiétudes, la jaune se dit qu'un peu de positivité serait sûrement plus agréable à l’écossais.

- Mais tu as l'air en bien meilleure forme déjà ! Tu as soif ?

Elle se saisit du verre pour lui tendre si il en avait besoin.

Après un hochement de tête, James sortit finalement son bras droit du drap pour venir saisir le verre d’eau. Eleanor avait ainsi la chance de découvrir ce que ses gants et ses manches longues cachaient depuis tout ce temps : une chair en lambeaux qui n’était que le cruel cadeau que lui avait légué un vieil incendie. Son annuaire droit portait une chevalière toute faite d’or jaune. Il but deux gorgées avant de se racler la gorge.

« - Merci. »

Il se redressa sur son lit, afin de se mettre dans une position entre l’assis et l’allongé.

« - Pour l’eau, et pour ce que tu as fait. »

C’était la moindre des choses que de se montrer redevable, même si l’écossais détestait cela. Il n’aimait pas ce sentiment de devoir quelque chose à autrui, et encore moins la position de faiblesse que cela entraînait. Et puis… Eleanor n’était pas n’importe qui, c’était encore plus compliqué dans ce cas-là.

Le regard de la jaune capta les marques de brûlures qui étaient habituellement cachés mais ne laissa pas ses yeux traîner dessus longtemps. Elle savait que ce n'était pas dû aux blessures dans la forêt et que ça devait remonter à avant Poudlard. Apparemment ce n'était pas la première fois que l'écossais s'était gravement blessé mais ce n'était pas un sujet qu'elle allait évoquer par pudeur pour le vert, surtout maintenant.

- Oh... C'est normal ne t'en fais pas.

Eleanor ne savait pas vraiment quoi répondre à ses remerciements même si elle les appréciait.

- J'espère juste que c'est la dernière fois que je te retrouve dans un tel état. Ce n'était pas très beau à voir...

Des images qui allaient rester gravé pendant très longtemps dans son esprit.

- Sinon tu as besoin de quelque chose ? Tu n'as pas trop mal ?

Si les profondes entailles étaient quelques choses qui guérissaient vite, il y avait tout de même ses côtes qui avaient énormément soufferts et pouvaient se montrer douloureuses.

« - Mal ? Eh… Ça fait pas du bien. »

Façon pour lui de dire qu’il souffrait sans se lamenter pour autant. Ses yeux jusqu’alors déposés sur son verre d’eau remontèrent pour croiser ceux de la rousse.

« - Mais non, je n’ai besoin de rien. »

Il regarda de nouveau le récipient qu’il tenait de sa main droite puis prit une troisième gorgée. L’écossais semblait encore moins à l’aise que d’habitude avec la Folsham.

- Très bien.

Eleanor sentait bien que la conversation ne semblait pas mettre James très à l'aise, à moins que ce vienne des chocs subis dans la forêt. Même si au fond d'elle la jaune savait que ça ne devait pas être évident pour lui d'avoir été aidé par quelqu'un comme elle. Après tout leur situation ne changeait en rien, d'autant plus qu'ils étaient en publique. Si d'ordinaire il ne se sentait pas très à l'aise, selon ses propres dires, quand elle était là alors à cet instant ça devait être pire.

- Tu dois juste avoir besoin de repos alors... je... je ne vais pas te déranger plus longtemps. Je voulais juste m'assurer que tu ailles bien.

Peu à peu la rousse se faisait une raison et elle n'allait pas imposer sa présence à son camarade en profitant d'un moment de faiblesse ou d'un quelconque sentiment de reconnaissance. Le plus important c'était d'avoir pu constater que tout allait au mieux pour James. Maintenant que c'était fait elle ne voulait pas être une gêne.

- Je vais rester un peu dans les parages pour donner un coup de main, si tu as besoin de quelque chose n'hésite pas.

Un sourire, peut être empreint d'une pointe de tristesse, fut accordé une nouvelle fois à James avant qu'elle se lève pour s'en aller (sauf si retenue tu connais).

« - Hm... » fit-il simplement en opinant du chef.

Lentement, le serpentard déposa son verre sur sa table de chevet, puis se couvrit à nouveau le bras droit. Ses dents vinrent ensuite mordiller sa lèvre inférieure d'hésitation, instant pendant lequel Eleanor s'était déjà retournée pour partir. Finalement, il reprit.

« - Eleanor. Si nos situations avaient été inversées, passé compris... Je ne t'aurais pas aidé. Tu le sais, pas vrai ? »

Comment savoir quelles étaient les pensées du serpentard derrière une telle question ? Où souhaitait-il en venir ? Difficile à dire pour la jaune, qui devait se contenter d'un regard planté profondément dans le sien - si elle se retournait.

Eleanor se stoppa dans sa marche et prit deux petites secondes à se retourner alors qu'elle analysait la question qui lui était posée. En soit ça n'avait rien d'illogique, la plupart des sorciers qui avait subis cette humiliante agression auraient sûrement de forts ressentiments envers ceux qui l'avaient attaqué. Elle était juste différente ou bête ou bien... Enfin son hypothèse ne lui paraissait pas pertinente alors elle posa une question qui lui sembla plus à propos.

- Et si nos situations avaient été inversés sans que le passé change ?

Car c'était la situation telle qu'elle était maintenant. Son regard était fixée dans celui de James aussi, se demandant le pourquoi d'une telle question. Lui faire comprendre qu'elle était idiote de l'avoir aidé ? Qu'il ne l'appréciait pas assez pour agir comme elle l'avait fait ? Qu'ils sont trop différents ? Dur de lire entre les lignes.

L'adolescent souffla du nez, détournant le regard de la rousse.

« - Crois-tu que je t'aurais laissé ? »

Le petit jeu de questions venait d'amuser l'Ashworth, laissant un maigre sourire habillé ses lèvres.

Un sourcils se arqua à la question qui semblait amuser James. Pour elle la réponse était évidente, même si ce serait peut être naïf.

- Non je pense que tu aurais fait la même chose que moi.

Un sourire en coin se dessina après un léger temps de pause ?

- J'ai tort ?

Visage amusé, l'écossais se contenta d'hausser les épaules...

Elle croisa les bras en fronçant les sourcils, un peu frustrée de ne pas avoir de réponse, ce qui était sûrement le but recherché par le taquin Serpentard.

- Tu peux rester dans le silence je sais que j'ai raison.

Eleanor savait parfaitement qu'il n'était pas du genre à laisser quelqu'un mourir, encore moins quelqu'un pour qui il avait de la sympathie à minima.

- Et même si j'ai tort ne nie pas, n'oublie pas que je peux faire de ta vie ici un Enfer.

Cette fois c'est la rousse qui afficha un air amusé.

L’Ashworth lâcha un profond soupir, levant les yeux pour fixer le plafond un moment.

« - C’est déjà un enfer, et ça ne fait qu’un jour… »

James avait tellement de projets en tête, tellement de réflexions et de discussions à mener… Mais cette infirmerie était sa prison et il allait devoir purger sa peine comme tout détenu.

« - Tu saurais pas pour combien de temps j’en ai, d’ailleurs ? »

Malgré sa tentative de fuite il semblerait que la conversation était parti pour durer un peu plus longtemps que prévu, alors Eleanor se rapprocha un peu plus de James pour lui apporter quelques réponses.

- J'ai entendu dire que ça devrait durer deux ou trois semaines, ça va dépendre de ta capacité à récupérer.

Mais au vu de la forme affichée après même pas deux jours ça devrait être plus proche des deux semaines. Jouant son rôle d'infirmière, la Poufsouffle lui donna un peu plus de détails.

- C'est surtout au niveau de tes côtes que ça va mettre le plus de temps à récupérer.

Eleanor se rappelait encore dans quel état elles étaient.

- Tu as aussi eu beaucoup de dégâts aux jambes mais je pense qui d'ici quelques jours tu devrais pouvoir recommencer à marcher un peu le temps que le tout cicatrise pour tes muscles et tes artères. Si tu veux je pourrais t'y aider un peu.

Entre les blessures profondes et l'inactivité durant sa période où il serait alité, ça pourrait être un peu dur au début.

Deux à trois semaines… Voilà comment déprimer le serpentard qui ne rêvait que de quitter cet endroit qui le rendait vulnérable.

« - Hm, ça ira je pense. »

L’adolescent s’enfonça dans son lit, grimaçant de douleur comme à chaque fois qu’il bougeait.

« - À bientôt Eleanor. »

Coupant court à la discussion, James ne doutait pas qu’ils auraient d’autres occasions de discuter.

Eleanor avait passé peu de temps à l'infirmerie mais ça lui avait suffit pour comprendre la frustration que ressentait James. Et paradoxalement c'était "à cause" de lui qu'elle le pouvait aussi.

- Courage c'est un mauvais moment à passer mais tu retrouveras vite toutes tes capacités.

Un ultime sourire et Eleanor s'en alla s'occuper des autres un peu.

- A bientôt James.

Alors qu'elle s'apprêtait à sortir, la voix de James l'interpela.

« - Eleanor. »

Il n'était pas des plus avenants, visiblement éreinté et atteint par la douleur qui le rongeait au niveau des côtes. En réalité, les deux premiers jours avaient été les plus simples que les suivants pour l'adolescent. Depuis, les anesthésiants moins puissants le laissaient souffrir et les visites moins courantes intensifiaient l'ennui qui s'installait progressivement. Tout cela lui laissait du temps pour réfléchir, mais ses pensées étaient constamment parasités par les évènements du tragique samedi soir. James réalisait doucement ce qu'il avait vécu. Les dangers bravés et traversés auraient pu mettre un terme à son encore courte existence, abattre son ambition démesurée d'un simple coup de faux. Il y avait des enseignements moraux à tirer de toute cette histoire, mais les faits étaient encore trop récents pour être justement analysés et transformés en leçons.

Eleanor commença à dépasser lit quand elle fut interpellée par le simple appel de son prénom sans un mot de plus ni sourire. Et en même temps elle se doutait qu'il devait toujours souffrir, c'était d'ailleurs peut être pour ça qu'il l'appelait. Un air interrogatif sur le visage, la Poufsouffle se présenta au chevet de son camarade de classe, les mains dans le dos, en lui répondant de façon aussi courte qu'il venait de le faire.

- James ?

James soupira. Il ne savait pas vraiment s'il souhaitait des réponses aux questions qu'il allait poser.

« - Cela fait quatre jours que je suis ici et on ne m'a toujours pas dit quand est-ce que je pourrai sortir. Ni si je garderai des séquelles de mes blessures, d'ailleurs. Toi tu sais, pas vrai ? »

C'était marrant de constater que c'était à elle que l'écossais posait ses questions comme si la jaune était vraiment une employée de l'infirmerie. C'était même touchant en un sens.

- Alors pour ta sortie je n'ai pas plus de précisions que la dernière fois que tu m'as demandé. Faudra demander à une infirmière, au pire je le ferai.

Ce n'était pas non plus Eleanor qui allait décider de quand James pourrait sortir et donc lui confirmer une date. La chevelure rousse bougea dans tous les sens quand la tête de la Poufsouffle se secoua en signe de négation.

- Des entailles, les cotes fêlées... Rien qui ne devrait pas empêcher un certain Ashworth de se remettre à gambader un peu partout comme avant.

Les blessures avaient cicatrisées et ses côtes se remettaient doucement mais sûrement en place, en sois il n'y avait rien de grave. Seulement une lente et douloureuse convalescence. Elle attrapa ensuite une mèche de cheveux qu'elle observa tout en se disant qu'ils étaient très longs. Eleanor haussa les épaules, sa réflexion capillaire se ferait plus tard, et redonna son attention à son patient sur qui son regard revint.

- Si tu as des séquelles ce ne sera pas physique, tu peux être rassuré.