WYVERN-CLUB

Sur la grande porte faites d'un chêne noir et après avoir tenté vainement de lire les écritures illisibles de la gravure dorée sur le mur, est visible une affiche manuscrite:





Vous pouvez entrer à l'intérieur d'une pièce agréable à l'œil. Si la porte est close cela veut simplement dire que le Club des explorateurs est fermé.





Les murs ont été décorés de quelques tapisseries et cadres aux divers blasons et écussons. Les tableaux qui jadis étaient non-animés semblaient être revenus de leurs sommeils éternels après avoir constatés que l'endroit reprenait vie. Les lustres scintillaient de part et d'autre dans la pièce, faisant miroiter les différents rayons d'astres bienveillants. Les vitres ne revêtaient plus autant la crasse et l'humidité des premiers jours, au contraire, l'éclat du soleil donnait à l'endroit une ambiance solaire qui égaie les cœurs après une rude journée de cours. L'âcreté et le vétuste avaient laissé leurs places à une odeur boisée et un environnement fort accueillant. Plusieurs canapés et chaises avaient été disposés ici et là pour recevoir, des étagères dépoussiérées servaient maintenant de digne réceptacle à la connaissance. Quelques bureaux et une grande table étaient installés pour planifier ainsi qu'orchestrer de futures recherches.

La parquet grinça sous les bottes du serpentard. Ses yeux s'arrêtèrent un instant sur l'affiche, reconnaissant quelques noms dont celui d'Augustus - dont la présence ici ne l'étonnait pas - avant de parcourir le reste de la pièce. L'endroit ressemblait à ce qu'il s'imaginait de la salle commune des Gryffondors, ce qui ne le surprit pas non plus. Silencieusement, James pénétra les lieux les mains dans le dos, comme s'il n'osait pas toucher ce qui ne lui appartenait pas, tandis qu'il commençait à détailler les diverses babioles disposées ci et là. Finalement, on aurait plus dit un touriste qui visitait un musée qu'autre chose.

Interpellé, James se retourna et découvrit le plus petit jeune homme de la contrée. Il se souvenait que Jude était là lors de l'inauguration du club de duel, mais c'était à peu près tout.

« - Hm. Comme tout le monde, j'imagine ? »

Ce club n'était au final que la modélisation concrète d'un désir présent chez tous les élèves, ou presque, du château.

« - Vous en avez découvert ? »

L'Ashworth finit une vitrine puis en commença une autre, pas spécialement convaincu.

« - Oh, pas spécialement. Enfin, c'est juste que Nymeria m'avait dit de passer il y a quelques semaines et j'ai un peu de temps là, donc je me suis dit que j'allais le faire. »

Il se désintéressa finalement des babioles, marchant jusqu'au Leigh.

« - Mais visiblement elle n'est pas là, et je ne sais pas vraiment ce qu'elle attendait de ma visite, alors... »

S'apprêtait-il déjà à partir ?

« - Hmmm… »

Le coude posé sur un accoudoir, l’index de l’écossais vint gratter sa joue.

« - Je sais pas, je n’y ai jamais vraiment réfléchi… Tu dirais quoi, toi ? »

« - C’est un interrogatoire ou une discussion ? Parce qu’en général un "et toi" attend une réponse plutôt que d’autres questions. »

L’écossais n’était pas agressif. Son ton se voulait plus taquin qu’ennuyé.

James soupira longuement. Ses yeux voyagèrent jusqu’à l’horloge… Il attendrait encore quelques minutes.

« - La vérité c’est que je ne cherche rien. Ce que je veux n’est pas quelque chose de caché, un mystérieux secret ou une légende antique. Ce n’est pas une question de récompense ou de voyage non plus. Je ne cherche, simplement, rien du tout. Et ici à Poudlard… J’ai déjà trouvé ce que je voulais. Allez, à toi maintenant, à moins que ça ne te suffise toujours pas ? »

Les yeux du serpentard s’étaient attachés à un point fixe au sol. Il semblait plongé dans ses propres réflexions, mais écoutait bel et bien son cadet.

« - Et bah… Je sauverai le monde. »

Cela ne pouvait pas être plus simple pour l’écossais, qui du haut de ses quinze ans, espérait être un jour assez influent pour le changer. Mais bon nombre d’enfants partageait ce même rêve utopiste.

« - Mais je ne crois pas que qui que ce soit puisse sauver le monde seul. Pour revenir à ce que t’as dit juste avant, de mon point de vue tu te trompes complètement. La vraie force c’est justement de réussir à accepter de dépendre de gens plus doués que toi. Tu ne seras jamais le meilleur partout, et si tu essayes de l’être, tu finiras par l’être nul part. »

Les pupilles charbonneuses du verdâtre vinrent se planter sur la silhouette du petit homme. Avait-il saisi ?

« - Subir ? Mais pourquoi les subiraient-ils ? »

Il était certain qu'entraîner des camarades dans des plans foireux n'avait jamais été dans les habitudes du serpentard. Contrairement au Leigh, l'Ashworth faisait partie de ceux qui aimaient réfléchir longtemps à l'avance plutôt que d'agir selon son cœur. Il aimait les plans infaillibles, aux multiples échappatoires, plutôt que de se lancer et d'espérer arriver au bout des choses par le simple instinct. Cependant, cela n'était pas sans défaut non plus.

« - Tu ne peux pas t'en vouloir d'être accompagné par des personnes qui souhaitent le faire. Disons... qu'on inverse la situation. Tu te décides à accepter d'aider un aveugle qui t'a demandé de le raccompagner chez lui. Sur la route, tu te fais tabasser par un ivrogne. Vas-tu en vouloir à l'aveugle que tu aidais, qui, selon toi, t'a donc fait subir le poids de ses actions, ou à l'ivrogne qui t'a frappé ? »

La discussion devenait intéressante, dommage qu'il manquait quelques cacahuètes à grignoter en même temps. Tous les clubs n'avaient malheureusement pas son Daniel Lockwood...

James voyait où le jaune souhaitait en venir. Il était vrai qu'il était parti du postulat que les actions étaient justes, mais aussi que les participants étaient éclairés à tous les étages.

« - Si ta situation voit le jour, c'est que ce quelqu'un et chacun de ses "amis" sont vraiment stupides, ou manipulables. Pour moi, excuse-moi mais oui... Dans ce cas ils méritent tous de tomber. Un vrai ami aurait été là pour lui dire que son idée était débile, et l'aurait empêché de se faire prendre. »

Il souffla du nez, imaginant un instant Alija lui mettre son poing dans la figure s'il osait un jour émettre une idée aussi idiote. Il la mériterait.

« - L'important n'est pas seulement de s'entourer, mais de bien s'entourer, c'est une évidence. Mais, en effet, il y aura toujours cette part de responsabilités qu'il faudra assumer quand tu décides des actions de ton groupe. Peut-être... Que tu n'es simplement pas fait pour ça, mais que tu ferais une ressource inestimable pour quelqu'un prêt à endosser ce rôle à ta place. »

Le monde était composé d'une infinité de caractères différents, et tous n'étaient pas faits pour mener.

« - Ne compter que sur soi-même reste une bêtise absolue à mes yeux malgré tes arguments, désolé. »

Jude pouvait sentir que James ne s'excusait pas vraiment, c'était plus une manière ironique pour lui d'appuyer le fait qu'il avait raison dans le débat.

James, étrangement, se mit à rire. Cela ne collait pas vraiment avec l'ambiance que venait de poser Jude, mais justement.

« - Oh, tu nous fais quoi là, petit bonhomme ? Arrête de parler comme si tu étais un parasite... T'as plein d'amis, non ? Les poufsouffles ont toujours plein d'amis. Allez, dis-moi ce qui ne va pas. »

L'Ashworth utilisait cette discussion comme passe-temps, et sous-estimait assurément le mal qui pouvait ronger le Leigh. Il n'était et ne sera jamais le meilleur pour consoler autrui.

« - Au lieu d'espérer qu'ils te tournent le dos, arrête d'être un boulet. Ce serait pas mieux ? »

James ne savait pas vraiment de quoi le Leigh parlait, mais semblait comprendre le sujet dans sa globalité. Jude avait vraisemblablement commis des bêtises que ses amis étaient assez gentils pour pardonner.

James sembla réfléchir un instant, mais n’hésita cependant pas sur sa réponse.

« - Une fois, oui. Pourquoi cette question ? »