Tour d’Astronomie

- Mais tu es stupide ma parole, avance! s’exclama-t-il en grinçant des dents.

Connor ne voulait pas se l’avouer, mais lui-même ressentait les effets de la maladie, et leur petit duel de tout à l’heure, bien que court, n’avait pas aidé à dissiper la fatigue.

Ses joues se gonflèrent, ses narines s’écartaient, et il souffla tel un buffle.

- Très bien, tu l’auras voulu! Incarcerem!

D’épaisses cordes vinrent entourer et enserrer la jeune Folsham au niveau des bras et des jambes. (Mal)heureusement pour elle, sa chute n’aura eu pour effet que de causer un grand ”pouf!” se perdant dans l’air frais de la tour ; elle s’était à peine égratignée.

Connor frappa du talon le sol, serrant les poings et observant Eleanor les yeux plissés et les coins de la bouche tirés dans une expression de dégoût total.

- Hmpf, toussota-t-il, imbécile… Aaargh… bon, tu vas attendre sagement ici, sinon tu peux dire adieu à ta baguette!

Connor dévalera les escaliers, laissant Eleanor seule, ligotée…

Malheureusement, personne ne vint au secours d’Eleanor… Une, deux, trois minutes… alors peut-être? Des bruits de pas se faisaient entendre, gravissant les escaliers, mais pour son plus grand dam, Connor en émergea, accompagné d’un de ses yesmen: le tristement célèbre Benjamin Brilliant. Ce dernier se fendit d’un rire gras en constatant l’état d’Eleanor, qu’il remua du bout du pied.

- Abîme pas la marchandise imbécile, pesta le préfet, à bout de souffle.

- Désolé Connor, fit Benjamin, déguisant à peine son ironie. Du coup je dois la Mobilicorpus jusqu’au bureau du professeur ”Food court” c’est ça?

Le préfet hocha la tête en réponse.

- Elle t’as donné du fil à retordre? s’enquit le gros lard aux cheveux gras.

- Non non, c’est une bonne à rien - c’est juste cette foutue maladie!

- Ah oui, moi ça va bizarrement j’encaisse bien le coup, même si c’est vrai que j’ai un plus petit appétit ces derniers temps…

Connor se contenta de grogner.

Malheureusement pour la jeune fille, qui jouait de malchance, la provocation n’eut pas l’effet escompté. Benjamin plaça une main sur son estomac et s’esclaffa d’un rire gras.

- Ahahahahah! Alors comme ça on pleurniche idiote? Continue de brailler, tes lamentations sont de la mus… Il fut coupé dans son élan par le soupir de son chef.

- Benjamin, juste Silencio la et on l’embarque, j’en ai marre là.

Le petit chouffin hocha la tête et viendra Silencio Eleanor avant de la Mobilicorpus, commençant à la déplacer, mais, la jaune le savait, même ligotée, elle pouvait gigoter et briser le sort…

Malheureusement pour la jaune, chuter alors qu’on la faisait léviter à même pas un mètre du sol ne risquait pas de lui faire grand mal. Elle se ramassa donc par terre, devant le regard consterné de Benjamin et celui exaspéré de Connor.

- Espèce de… commença le yesman, qui se fit couper la parole.

- Tiens toi tranquille, tu sais ce que j’ai dans ma poche Eleanor…

Connor tapota ladite poche de sa main, un sourire difficilement vantard perçant les traits fatigués de son visage.

Arrivée sur les dernières marches des escaliers, la jeune Harpis se mit sur la pointe des pieds pour essayer de mieux apercevoir le garçon ou, plutôt, l'homme qui contemplait le ciel morne. Elle aurait voulu sautiller pour encore mieux le voir, mais elle craignait que le bruit ne la fasse repérer. Finalement, elle gravit une marche de plus, qui couina un peu trop à son goût, et les quelques centimètres qu'elle gagna suffirent à la convaincre que c'était bien lui. Non, définitivement, elle n'imaginait pas un seul instant qu'il puisse avoir un quelconque rapport avec tout ça. Toutefois, cela n'expliquait pas pourquoi il avait mystérieusement déserté la salle commune. Certes, il n'était pas le garçon le plus sociable (même pour un Serdaigle) qui soit, mais tout de même... Cela faisait des mois qu'elle ne l'avait même pas aperçu et il ne lui semblait pas que d'autres élèves de la maison bleue puissent être dans le même cas.

Peut être savait il quelque chose qu'elle ignorait ? Cela ne coûtait rien d'essayer, après tout...

- Psst ! Arles !

La jeune fille avait chuchoté, à peine assez fort pour se faire entendre si Arles n'était pas trop perdu dans ses rêveries. Encore "perchée" sur les ultimes marches de l'escalier, il n'y avait que la touffe de cheveux ambrés et la paire d'yeux profondément cernés de la jeune fille qui dépassaient le seuil de la tour, pour l'instant.

L'homme de dos, rappelé sur terre, mis une poignée de secondes avant de réagir. Tout juste ses épaules se soulevèrent elles en réponse à l'appel de son nom, dans un fin soupir. Il entama de se retourner, lentement, pivotant d'abord le buste tout en laissant trainer son regard vers le firmament avant de trouver la force de s'en détacher finalement. Les yeux à demi clos, un regard expectatif se portait sur Celonia.

Elle jeta un regard derrière elle pour s'assurer qu'aucun visiteur impromptu n'était sur ses talons, puis se décida, enfin, à monter les ultimes marches la séparant du plancher. Le regard que lui lança Arles était clair dans ses intentions, Celonia ferait mieux d'avoir une raison valable de le déranger... Le problème était qu'elle n'ené tait absolument pas certaine.

- Désolé de te déranger, je voulais te parler dans la salle commune, mais tu es devenu difficile à trouver...

Admit elle en se fendant d'un sourire quelque peu embarrassé.

- J'enquête sur les punaises... Enfin je cherche surtout un moyen de m'en débarrasser et j'interroge un peu tout le monde pour savoir s'ils ont des informations à ce sujet.

Autant mettre les pieds dans le plat et ne pas s'égarer en prolégomènes. L'aspect physique de la jeune Harpis suffisait à expliquer pourquoi elle s'impliquait dans cette "quête".

Le regard et le visage de Rayne témoignaient d'une chose: rien de particulier ne s'y trouvait. Pas de cernes, pas de traces de fatigue ni même d'inquiétude. Toute l'impassibilité du monde régnait encore et toujours sur son visage, dans un contraste flagrant avec la plupart de ses camarades dont on voyait à vue d'œil la diminution physique. Dans le cas d'Arlès, cela pouvait certes s'expliquer par les rumeurs qui trainaient sur lui: ce type passait sa vie à s'entrainer. A un rythme anormal, l'isolant de toute relation sociale au profit de son propre exercice. Ceci au point d'accumuler une certaine avance lui ayant permis de foudroyer son adversaire sur place au dernier tournoi par un tour de passe passe aussi peu honorable que redoutable et impressionnant. Dans ces conditions, le fait que son corps soit plus difficile à assaillir était une hypothèse valable.

— Je me suis renseigné aussi. Commença t-il après tout de même un instant de réflexion. Elles sont censées résider dans la literie, or personne n'en a jamais vu même en réduisant son matelas en charpie. Si tu veux non pas t'en débarrasser mais qu'elles t'épargnent, tu n'as qu'à faire bande à part. J'ai quitté la Salle Commune avant d'être infesté et je n'ai jamais eu de problèmes. Si elles sévissent dans les dortoirs et que personne n'en retrouve sur soi la journée, il suffit de ne pas retourner là où elles frappent.

Celonia avait toujours un peu d'appréhension lorsqu'elle devait parler avec Arles, mais celui-ci n'avait jamais rejeté une de ses questions. Elle culpabilisa un peu de toujours le voir aussi intimidant que lors de ses premières heures dans le château, mais rien n'y faisait, Arles savait jouer son rôle. Elle écouta attentivement les paroles du champion de duels avec intérêt, son regard fatigué renaissant alors qu'un éclat de curiosité commençait à chatoyer en son sein.

- Alors il suffirait de dormir ailleurs que dans une salle commune pour se débarrasser de ces choses ? L'idée semblait séduisante, mais... Oserait elle le faire ? Dormir seule quelque part dans le château, sans aucune sécurité ? Peut être devrait elle en parler à Blackwine ? Cela pouvait se tenter...

- M...Merci ! Tu es le premier à m'apporter une vraie information sur le sujet ! Par contre... C'est quand même bizarre qu'on en retrouve aucune et qu'elles ne soient pas capable d'atteindre les élèves hors de leurs dortoirs... Il y a peut être des indices à tirer de tout ça...

Elle semblait soudain complètement revigorée. Même si elle préfèrerait résoudre le mystère, avoir une solution contre les punaises était déjà une splendide solution.

— Ces insectes ne peuvent pas suivre les élèves dans tout le château avec leurs petites jambes, de toute évidence. Si elle devaient infecter des lieux éloignés des dortoirs, ce serait en transitant par les affaires des gens. Or, elles ne nichent pas dans les affaires des gens ou dans la literie où elles devraient se trouver, de fait, elles ne peuvent pas investir de nouveaux lieux. C'est ce comportement qui est étrange et qui va même à l'encontre de leur propre développement. Enfin... Souffla t-il finalement.

Le ton adopté en dernier lieu laisser aisément deviner la fin de sa phrase s'il l'eut prononcée. "Enfin... Ce n'est pas mon problème."