Hall d’étude

« - Oh, oh, oh… Mais voilà le meilleur joueur de Quidditch de notre promotion. »

Cette belle phrase pleine de compliments fit accompagner de quelques tapes sur l’épaule plutôt dérangeantes, tandis que James s’attablait déjà en face du rouge et or. Il avait tiré une chaise sur laquelle il s’était assis à l’envers, posant ses coudes sur le dossier. Face au Gryffondor, la vipère d’apparence bienheureuse se régalait d’avance.

« - Alors Willy, j’ai eu vent que les bleus étaient venus vous embêter pour le terrain de Quidditch dans la semaine ? »

De sa poche, l’Ashworth sortit une orange qu’il commençait à éplucher. Il déposait la peau sur le bureau que son camarade s’était réservé.

Le sourire du reptile s’était creusé. Un premier quart d’orange vint s’engouffrer dans sa bouche pendant qu’il écoutait les paroles de son camarade, qui visiblement, avait pris son approche au premier degré. En réalité, James s’était foutu de lui. Tout le monde savait Maria-Esperanza bien plus douée que lui au Quidditch.

« - Peut-être, peut-être… »

Il fit semblant de s’intéresser à ce que le Gryffondor venait de lui dire, mais balaya tout aussi vite ses paroles pour apporter son propre sujet.

« - Mais ça ne t’a pas empêché d’essayer de l’inviter au bal, à ce qu’il parait… »

Le serpent s’enroulait doucement, couvrant sa proie de ses écailles avant de mordre. Il engloutit un nouveau quart d’orange. L’œil avertit du ganté observait son interlocuteur avec attention.

Mais pour combien de temps encore ? La carrière de Maria n'est dû qu'à la chance jusqu'à présent. C'est maintenant que tout se joue.

- Me dis pas que tu es jaloux parce que tu as été une fois au bal avec elle à notre première année en plus.

Puis de son air habituel enjoué il continuera de lui répondre d'un air taquin.

- Qui n'a jamais rêvé d'une relation interdite entre deux membres d'équipes adverses à qui tout oppose. Un peu comme Roméo et Juliette mais pas sûr que tu connaisses.

Il n'a pas l'impression que James soit intéressé par la littérature.

- Sinon, James, je te connais un peu. Va droit au but, dis moi ce que tu veux.

« - Ce que je veux ? »

Faussement étonné, James plaqua son buste contre le dossier histoire de se rapprocher un maximum de William. Ses yeux encrés dans les siens, il reprit.

« - Je peux t’aider, avec Maria. Je l’aime bien et j’aimerais qu’elle soit avec quelqu’un de correct cette année. »

À quel point cette proposition allait intéresser William ? Il n’en savait rien.

« - Mais je me suis peut-être trompé ? Tu n’es pas tant intéressé que ça, finalement ? »

L’Ashworth parut déçu. Il pensait vraiment que son camarade rêvait d’une soirée aux bras de la capitán.

Quel déception… Décidément, personne ne semblait savoir s’amuser dans cette école. Si le gryffondor avait peur d’être berné, le serpentard voyait son temps perdu à jamais.

« - Je ne sais pas, je verrai au dernier moment sûrement. Comme d’habitude. »

Cette technique ne l’avait jamais laissé tomber jusque-là. Et puis… Il fallait dire qu’il avait aujourd’hui le choix, grâce à une popularité qui s’était décuplée au fil des années.

« - Mais pour ta gouverne, je voulais simplement t’aider en te donnant quelques conseils par rapport à Maria, en aucun cas m’immiscer dans l’histoire et vous arranger quoi que ce soit. »

Tant pis pour lui, l’Ashworth n’allait pas rater ses nuits parce qu’un idiot de rouge et or refusait son aide. Il poussa sur ses bras pour s’écarter du bureau puis se releva.

« - Allez, je te laisse champion. »

James s’en alla sauf s’il était retenu.

« - Si le Quidditch m’intéressait, Serpentard serait champion chaque année Willy, voit ça comme une aubaine. »

Était-ce de l’humour ? James le pensait peut-être, impossible à dire sans être dans sa tête.

« - Mais pour toi… La réorientation est plutôt maligne j’imagine. »

Sachant que James avait perdu une finale contre Navis et gagner les autres contre Eleanor, c’était mal envoyé de la part du Gryffondor… Mais il n’attendait rien de mieux de la part d’un rejeton de moldus… Le pauvre.

« - Ouais, j’hésiterai pas. »

Le Serpentard avait perdu bien assez de temps pour aujourd’hui. Il s’en alla.

Ce même devoir que l'Infante avait déjà fait il y a quelques jours maintenant, malgré la fatigue, l'accentuant aussi. Aussi ce n'était pas à cause de celui-ci qu'elle pénétra à l'intérieur du hall d'études, et qu'elle écarquilla les yeux en voyant son comparse jaune ... définitivement pas un habitué des lieux oui.

-"Tu as besoin d'aide Johannes ?"

Il en avait l'habitude maintenant si il jetait des coups d’œil à ses comparses de classes, María faisait partie -hélas- des élèves constamment fatigués, en témoignaient les grosses poches noirs de cernes et son teint blafard.

Il ne releva pas les yeux de son parchemin, occupé qu'il était à le noircir de phrases vaguement cohérentes, suivant le fil de sa pensée.

-Boarf... Si j'ai une mauvaise note, je préfère assumer. Et puis, tu ferais mieux de te reposer, non ? Chez nous les poufsouffle ceux qui sont malades ils dorment douze heures par nuit - au moins deux de plus que d'habitude. Au moins, ça ne leur coupe pas l'appétit, c'est déjà ça.

Malgré les plaisanteries Maria pourrait sans doute sentir dans la voix de Jo une pointe de lassitude, qui n'avait rien à voir avec la maladie ou le devoir en retard. Simplement la sensation de jouer sur une partition éculée, celle des clichés dont sa maison était victime.

Elle secoua la tête, elle ne pouvait pas se reposer non, María avait beaucoup trop de choses à faire avant de pouvoir s'endormir. Et ... son corps le lui faisait payer bien souvent les fins de semaines.

-"J'aimerais bien mais c'est impossible."

Et d'ailleurs c'était aussi impossible de dormir douze heures ! Elle imagina le temps perdu si elle se reposait ce laps de temps ... et en frissonna. Pour bien marquer cela, elle s'installa juste en face du Poufsouffle.

-"Mais tu t'y es pris un peu tard non pour le faire ?"

Jo n'était jamais tout à fait à l'aise lorsqu'un malade s'approchait. Les miasmes de l'air pouvaient ils répandre le fléau ? Pour le moment rien ne l'indiquait particulièrement, mais on ne savait jamais. Enfin, on n'allait pas donner une crécelle à chacun d'eux comme à des lépreux. Il s'efforça donc de ne rien laisser paraître en voyant sa camarade s'installer juste en face.

-Pourquoi impossible ? Ils devraient vous garder à l'infirmerie, on sait pas, c'est peut être dangereux... dangereux pour vous hein, je veux dire, et je te le souhaite pas, bien sûr.

Sa plume dérapa et il fit un pâté d'encre. Jurant entre ses dents, il l'effaça au moyen de sa baguette.

Bien loin des contraintes hygiéniques pourtant connues à l'époque -du moins certaines- l'Infante n'avait pris le temps de savoir si son camarade l'acceptait en face d'elle, dans sa tête elle n'était point malade, juste un peu fatiguée, rien de méchant, mais surtout pas malade et comme elle ne toussait ni n'éternuait, tout allait bien donc.

-"Je n'ai pas le temps pour dormir plus que de raison Johannes. Beaucoup trop de choses à faire."

Elle avait sorti un carnet, griffonnant une sorte de tableau qu'elle complétait au fur et à mesure des secondes s'écoulant.

-"Et les infirmières ... ne sont pas vraiment ... enfin c'est compliqué et je ne suis pas certaine qu'elles sachent ce qu'elles font."

L'Infante n'y était bien sûr jamais allée pour juste un peu de fatigue, mais elle savait que certains élèves étaient touchés par un mystérieux mal dont les effets étaient assez ... bizarres : c'était comme si la magie ne leur répondait plus, leurs sortilèges perdant leurs éclats ...

-"Tu es certain de ne pas vouloir d'aide ?" Insistant une dernière fois.

-Franchement je suis lancé là, y a rien pourrait m'arrêter, j'écris, ça sort tout seul, on pourrait appeler ça une logorrhée je crois, et rien ne pourra me détourner de ma concentr...

Il releva la tête d'un coup, la plume suspendue, fixant Maria d'yeux catastrophés.

-Mais... tu seras en état de jouer au prochain match ?

Souriant légèrement pendant l'homélie du père Vermaat, María s'était repenchée sur son petit carnet, écrivant, dessinant sur celui-ci, organisant frénétiquement ses tâches.

-"Hmm ... et bien oui je pense."

Elle avait de nouveau relevé la tête vers son voisin, son inquiétude, qu'elle sentait légitime et pleinement intéressée puisque Serdaigle ne jouait pas contre Poufsouffle la prochaine fois.

-"C'est juste un peu de fatigue ... Je ferai une bonne nuit de sommeil avant ce weekend !"