[PRIVE] Derrière une épaisse grille

Les mots de la rouge se perdirent d’abord dans le silence, se heurtant aux pierres des murs l’entourant et au marbre d’un visage indifférent. Seuls des bruits de mastication hachaient sa solitude, puis, finalement, après de longues secondes, un soupir.

- Tant de considération pour ma personne.., lança-t-il plus à lui-même qu’autre chose, tout en suivant légèrement son mouvement, permettant à la rouge de distinguer ses traits.

Ses paupières se refermèrent, sa dextre se leva et son index vint se poser sur ses lèvres ; à la manière d’Harpocrate, il semblait s’être plongé dans une contemplation silencieuse. Après un moment qui avait paru interminable, ses lèvres s’entrouvrirent et sa voix se fit entendre, parvenant à la rouge comme une légère brise.

- J’imagine qu’entre amis on doit se rendre service… tu viens jusqu’à moi désemparée, presque désœuvrée… en quête de réconfort, de sens, de réponses à tes problèmes?

Il expira, son souffle se cristallisant presque au contact du froid, lui donnant la consistance d’une épaisse buée.

- Mais… ce que je vois, c’est que tu n’as pas vraiment espoir, hm? Puis… que je sois pris, et toi dénoncée… à quoi bon? Me rendre coupable de ta bêtise, et me laisser emporté par celle-ci…

Il secoua lentement la tête, tout en pivotant légèrement sur son tabouret pour mieux poser un œil sur Nymeria, grand ouvert.

- Tu sais tout autant que moi… que ce quelque part qui t’attend est tout autant indifférent à tes souffrances que ce monde ou moi-même pouvons l’être… et pourtant, ce sont les deux choses vers lesquelles tu orbites, quant à l’autre, nul n’y échappe. Ne trouves-tu pas cela curieux?

S'entendre qualifiée d'amie par le jaune aux cheveux blanc passe une vague de bien être- furtive mais présente à l'instar d'un feu de bois entre deux blizzards- à travers la lionne dont le visage en partie masqué se pli d'un sourire fin et  spontané. Cela représente beaucoup pour la concernée consciente que le mot mis dans la bouche de son ainé goute différemment pour ce dernier, ceci du à sa condition de spectre vivant et tout ce qui en découle, c'est d'ailleurs en connaissance de cet état que Nymeria se vois touchée. Comme ils sont nombreux les Poufsouffle à se démarquer et comme ils ne réalisent pas..
Ainsi lorsque le jeune homme se concentre sur sa personne la sorcière fait de même, renvoyant à l'envoyeur le regard qui lui est lancé avant de le baisser une fois la question posée, le temps de réfléchir rapidement.

- Que cela vous soit indifférents n'as pas d'importance si ces choses comptes pour moi.

Les symboles derrière chaque idées et existants ainsi que ce qu'ils sont concrètement, quel que soit la teinte du filtre ainsi que son épaisseur Nymeria y discerne des nuances grossières et subtiles propres à sa perception. C'est avec les divergences propres à chacun que sont bâtis les empires et abattus les royaumes, soumis et libérés les peuples, avec ces visions que les éons se plient à la volonté des êtres. Que Sun ne puise saisir ne surprend pas sa cadette qui semble s'en satisfaire, rares sont les les occasions d'apprendre au jaune et cet instants ne semble pas propice pour tel exercice.

- Mes yeux, ma réalité.

Ce qui ressemble à de la peine brille dans le fond de ses yeux lorsque la rouge ajoute:

- Pour le coup, tu rate quelque chose.

Il l’aura écoutée en silence, entamant d’achever son repas, ne laissant rien transparaître d’une quelconque réaction aux propos qu’elle avait tenu. Celui-ci terminé, environ une minute après que Nymeria ait prononcé ces paroles, que son camarade se levait, lui tournant à nouveau le dos. Il sembla se passer une main sur le visage, inspira profondément, puis vint faire face à la rouge, s’approchant d’elle, baguette en main.

- Attrape.

Il lui lança ladite baguette en cloche avec tout juste assez de délicatesse pour que l’attraper en vol lui soit aisé.

- Aller, bouge, je vais dormir un peu. Profites-en pour t’entraîner.

Il avait accompagné sa voix par un vague et las geste de la main, signifiant probablement quelque chose du genre ”aller, va t’occuper ailleurs”.